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Venture
Année : 1981
Système : Arcade, Atari VCS, Colecovision, Intellivision
Développeur : Exidy
Éditeur : Exidy
Genre : Arcade / Labyrinthe / Shooter
Par JPB (05 juin 2009)
Le flyer. Cliquez sur une image pour une version plus grande.
Merci au site Arcade Flyer Archive !

L'autre matin, j'ai eu une envie subite de rejouer à un vieux jeu, que j'avais acheté sur ma console ColecoVision. Je me suis dit que ce serait plus simple de lancer M.A.M.E. et de rechercher la version arcade de ce jeu, ce que j'ai fait le midi même. Et je me suis retrouvé à jouer à Venture, version arcade, qui présente quelques petites différences avec la version Coleco. Mais je me suis rendu compte que ces quelques variations ne changeaient pas grand chose, et je me suis bien amusé pendant un petit moment.

Et puis, je me suis rendu compte que Venture n'avait pas l'air d'être connu, alors je me suis dit que c'était le moment d'en parler sur GrosPixels.

Un Gauntlet avant l'heure ?

Si si, un peu comme Gateway to Apshaï pouvait être considéré comme un précurseur de Diablo...

Dans Venture, vous endossez le rôle de Winky, qui veut trouver tous les trésors cachés dans les profondeurs d'un sombre donjon. Armé d'un simple arc et de flèches, il va braver des dangers encore inconnus, des monstres plus ou moins abominables, mais revenir les bras chargés de butin - enfin, si vous ne vous faites pas tuer.

Les écrans d'intro.

Le jeu est d'une simplicité enfantine.

Dans chacun des trois étages, vous commencez dans d'immenses couloirs, où rôdent d'énormes monstres verts : les Monstres des Couloirs ("Hallmonsters" d'après Exidy, et ceux qui ont dit "Hulk" peuvent d'ores et déjà sortir). Ils ressemblent à des têtes de mort, et leur taille démesurée est surtout liée au fait que vous êtes représenté dans ces tableaux sous la forme d'un tout petit point orange !

Les Monstres des Couloirs errent sans but précis dans les corridors, mais s'ils vous repèrent, ils se dirigent vers vous. Heureusement, vous êtes bien plus rapide qu'eux et il est facile de les éviter. Prudence cependant, ils apparaissent l'un après l'autre jusqu'à atteindre leur nombre de patrouille, prenez garde à ne pas vous trouver au mauvais endroit lorsque l'un d'eux surgit du néant !

Le hall du premier niveau.
Salle des Gobelins.

Chaque étage contient 4 pièces, avec un ou deux accès. Une fois qu'on a choisi de pénétrer dans l'une d'elles, l'échelle de représentation change par le biais d'un zoom, et on retrouve un Winky toujours orange, représenté cette fois sous la forme d'une tête souriante avec un arc autour d'elle. Dans chaque salle, dont le nom s'inscrit en haut de l'écran, se trouvent un trésor et un certain nombre de monstres : le moindre contact avec eux est mortel, il faut donc soit les détruire (et ne pas toucher leur cadavre qui se désagrège lentement), soit au moins les éviter.

La Salle des Murs, facile celle-là.
Les Serpents sont de vraies plaies.

L'élimination systématique des adversaires n'est pas le but en soi, je précise bien que l'objectif de Winky est uniquement de rafler tous les trésors.

Mais je veux me battre !

Au départ, sachez que le maniement de Winky dans les couloirs est des plus basiques : 8 directions et c'est tout. C'est seulement une fois entré dans une pièce que vous pouvez tirer. Pour cela, il faut diriger Winky dans une des 8 directions habituelles par une petite impulsion sur la manette (Winky n'avancera pas), et tirer - seulement un tir à la fois. Ceci entraîne un petit problème qui peut s'avérer délicat en cas de fuite : lors de chaque changement de direction... il y a ce petit temps de réaction avant que Winky se mette à avancer. Dans les situations désespérées ça conduit bien souvent à la mort.

Le combat n'est pas obligatoire... mais parfois un peu quand même. En fait, dans chaque salle, les monstres sont plus ou moins nombreux et leurs déplacements sont parfaitement aléatoires - et très souvent déstabilisants. Or, pour accéder au trésor, il faut parfois passer dans de petits espaces, ce qui est très délicat. Dans ces cas-là, il ne faut pas hésiter : truffer les monstres de flèches. Enfin, pour être précis, truffer chaque monstre d'une seule flèche, un coup au but suffit pour l'immobiliser et le voir disparaître en poussière en quelques secondes. Oui, même les cadavres des ennemis sont mortels, il ne faut pas les toucher.

Deux remarques concernant la disparition progressive des monstres :
- si vous avez le malheur de tirer à nouveau sur un cadavre, même s'il n'en reste que quelques points, il se reconstitue et il faut de nouveau attendre qu'il se désagrège... Attention à ne pas tirer à tort et à travers.
- prenez garde à éviter de détruire les monstres contre une sortie, car si c'est la seule échappatoire, vous devrez attendre qu'ils aient complètement disparu pour pouvoir quitter la pièce... Autant dire que si un Monstre des Couloirs choisit ce moment pour s'inviter vous êtes perdu !

Un Monstre des Couloirs approche dans la
Salle des Squelettes, je fiche le camp !
Calcul des points bonus entre 2 niveaux.

Si certains monstres sont faciles à atteindre (enfin, facile, c'est relatif), d'autres se prêtent moins volontiers au lardage de flèches. Je pense notamment aux serpents, qui sont pratiquement intouchables tellement ils sont fins et glissants. Vous vous apercevrez vite que tous vos ennemis ont la sale manie de s'écarter de la trajectoire de la flèche au dernier moment, ça donne vraiment l'impression qu'ils se jouent de nous...
Et comme on essaie de les abattre ces sales bêtes, mais qu'on n'ose pas trop se rapprocher de peur qu'ils nous touchent, alors on tire, encore et encore, on essaie de les toucher enfin, on se dit que le prochain tir sera le bon !... ce qui fait qu'au bout d'un moment on est resté trop longtemps au même endroit : un Monstre des Couloirs fait alors son entrée dans la pièce. Le temps pour lui d'apparaître complètement, et il se dirige en ligne droite vers Winky. Seule chose à faire : fuir en sortant de la pièce, il est invulnérable !

Le hall du deuxième niveau.
Certains murs vont disparaître.
Les Trolls vont vous foncer dessus !

Une fois que vous avez complété les 4 salles du premier étage, vous obtenez un bonus lié à la rapidité à laquelle vous avez agi (le décompte figure toujours en haut de l'écran), et vous passez au deuxième étage.

Comment sont les deux autres étages ?

Comme le premier sur le principe : composés d'un hall rempli de Monstres des Couloirs rouges, avec quatre pièces.

Les Ettins apparaissent une fois qu'on
a pris le trésor, tout en bas de la salle.
Qu'ils sont collants les 4 dragons !
Impossible de manœuvrer sans risque.

Mais rassurez-vous : si vous trouviez le jeu trop facile jusque là, apprenez que les monstres rencontrés au deuxième étage sont bien plus coriaces que ceux du premier. Ce n'est pas qu'ils soient plus résistants ; mais ils sont plus rapides, bougent de façon plus désordonnée (ou vous foncent dessus comme les Trolls), ça commence à devenir dur de finir l'étage ! De plus vous commencez à faire connaissance avec les pièges : des monstres qui apparaissent seulement quand vous avez ramassé le trésor (Ettins et Araignées), des murs qui s'ouvrent au bout d'un moment (salle des Trolls)...

Ces deux araignées remplacent les 3 autres
une fois qu'on a pris le trésor, au milieu.
Le hall du troisième niveau.

Quant au troisième étage, c'est encore pire que le deuxième. Les Monstres des Couloirs bleus sont encore plus nombreux qu'aux niveaux précédents...
En fait dans les salles de ce niveau-là, on en arrive à plus tenter de se faufiler entre les monstres (avec les risques que ça comporte) que de leur tirer dessus. Leur rapidité et leur sale manie de toujours éviter la flèche de quelques centimètres fait qu'on perd trop de temps à essayer de les toucher.

Les Cyclopes.
La Salle des Génies, la lampe tout en haut...

Une fois que vous avez réussi à trouver tous les trésors des 3 étages, vous recommencez au premier avec de nouveaux trésors et des monstres plus rapides.

Que dire de la réalisation ?

En 1981 on avait peu de jeux de ce type, on était plutôt dans les shoot'em up (Scramble) ou les labyrinthes (Amidar). Un jeu qui se rapproche de Venture serait Frenzy (la suite de Berzerk, sorti en 1980). Mais ce genre n'était clairement pas la norme.
Petite parenthèse, l'entrée en scène d'un Monstre du Couloir dans une des salles de Venture rappelle fortement l'apparition d'Otto au bout d'un moment dans Berzerk ou Frenzy, dans tous les cas il n'y a pas d'autre solution que la fuite.

Les Démons vous empêchent de ressortir.
La salle des Chauve-Souris.

Venture a des graphismes simples. On est d'accord que ce n'est pas le point fort du jeu, même s'ils sont colorés et que les dessins des monstres sont variés. Non, le point fort du jeu, ce sont les nombreuses musiques qu'on entend tout au long de l'aventure. Qu'on entre dans une pièce, qu'on ramasse un trésor, il y a toujours une petite musique qui se fait entendre. D'ailleurs, chaque pièce a sa propre musique, ça fait déjà 12 mélodies différentes sans compter l'intro, les halls, etc... ce qui est remarquable.

Quelques-uns des premiers trésors.

L'animation de Venture est fluide, mais ce sont les déplacements qui sont un peu sujets à caution. Le petit temps de latence dont je parlais plus tôt lorsqu'on veut changer de direction dans une salle, le fait que les ennemis aient quand même la tremblote, c'est parfois un peu limite. Du coup il arrive qu'on peste parce qu'on ne peut pas avancer dans une salle, vu que les monstres bloquent l'accès au trésor (ou pire, à la sortie) et qu'on n'arrive pas à les éliminer. Mais c'est aussi le jeu qui veut ça...

Et à la maison ?

Exidy a accordé la licence de 3 de ses jeux de l'époque (Mouse Trap, Venture et Pepper II) à CBS, pour des adaptations en 1982 sur les principales machines de l'époque : Atari VCS, Mattel Intellivision, et CBS ColecoVision. Du coup, lors du lancement de la Coleco, Venture faisait partie de ces nouveautés alléchantes, dont les graphismes n'étaient peut-être pas aussi impressionnants que ceux des Schtroumpfs ou de Zaxxon, mais dont les musiques étaient d'un niveau encore jamais entendu auparavant. Jusqu'au magazine Tilt qui testa la version Coleco de Venture dans le n°6, et qui écrivit - je cite - "des bruitages fabuleux, inconnus jusqu'ici, rendent votre quête bien agréable, à tel point que l'on retarde volontiers sa sortie des salles redoutables pour profiter des effets sonores."

J'insiste un peu sur la version Coleco pour signaler quelques détails. Les musiques sont pratiquement les mêmes que dans la version arcade, c'est ce qui a fait le succès de cette version. Les graphismes sont réellement fidèles à l'original, et on retrouve même ce temps de latence entre deux changements de direction. C'est une conversion vraiment fidèle, cheval de bataille de CBS : "De vrais jeux de cafés en cartouches chez le consommateur". La Coleco avait des graphismes plus évolués que ses concurrentes de l'époque, le slogan était d'autant plus justifié sur cette machine : ils n'étaient pas fous chez CBS !
Accrochez-vous, une publicité télé est même dispo sur le net à cette adresse : http://www.fuzzymemories.tv/?c=1689.

La version Atari 2600 est, compte-tenu des capacités de la console, très fidèle, mais curieusement elle est bien plus jouable que l'original ou que la version Coleco : d'une part, les monstres sont moins difficiles à abattre ; et d'autre part, Winky n'a pas ce temps de latence entre deux changements de direction.

Version Atari 2600.
Version Intellivision.
Version ColecoVision (avec la photo de ma cartouche, quel bonheur !)

D'autres jeux, conversions non officielles, sont sortis sur les ordinateurs Atari 400/800 (Fortune Hunter) et sur Tandy (Venturer). Disons qu'ils se rapprochent du principe de Venture, mais qu'ils ne sont pas aussi "clonés" que, par exemple, Crazy Comets sur C64 qui reprend presque bit pour bit le jeu d'arcade Mad Planets.

Fortune Hunter sur Atari 400/800/XL/XE.
Venturer sur Tandy Color.

Venture n'est pas très connu. Il n'est pas inoubliable, mais a de nombreuses qualités, et faisait partie des premiers jeux qui ont fait le succès de la ColecoVision. Pour toutes ces raisons, il mérite largement sa place sur GrosPixels et dans les annales du rétrogaming.

JPB
(05 juin 2009)
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