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Aztec Challenge
Année : 1983
Système : C64
Développeur : Paul Norman
Éditeur : Cosmi
Genre : Arcade / Plate-forme
Par Sebinjapan (04 juin 2012)

Le Commodore 64 est une de ces machines qui a connu une très longue durée de vie commerciale, en restant populaire dans de nombreux territoires. Si la bécane est réputée pour ses jeux techniquement impressionnants, illustrés par des musiques qui déchirent grâce au fameux processeur sonore SID, il s'agit là de titres sortis pendant sa période de maturité, alors que les programmeurs maîtrisaient les entrailles de la bête. Cependant, dès les toutes premières années, on trouvait des jeux captivants, bien que relativement primitifs à la fois dans leur réalisation et dans leur principe, dans la continuité des premiers jeux d'arcade et des titres typiques de l'Atari 2600 ou de la Colecovision. Un de ces jeux inoubliables pour les premiers possesseurs de la machine, c'est Aztec Challenge.

On doit Aztec Challenge à Paul Norman, à l'origine musicien sensible aux nouvelles technologies du multimédia, et qui livrera au Commodore 64 quelques titres marquants comme les jeux d'action/aventure Forbidden Forest ou les impressionnantes (pour l'époque) simulations d'hélicoptère Super Huey. Bien qu'il ne soit pas forcément son meilleur jeu, surtout pas techniquement, Aztec Challenge reste cependant son titre le plus apprécié, revenant sans cesse dans les conversations entre les nostalgiques fans du célèbre micro-ordinateur.

Beyond the Forbidden Forest et Super Huey 2 : deux bons jeux de Paul Norman.

L'intrigue est simpliste mais dépaysante au milieu des thèmes d'heroic-fantasy ou de science-fiction qui servent plus habituellement de cadre à un jeu vidéo. On incarne ainsi un esclave aztèque destiné à servir de sacrifice humain, à moins qu'il ne parvienne à surmonter plusieurs épreuves qui lui permettront de retrouver sa liberté.
Avec des moyens très limités, quelques décors pauvres en couleur mais néanmoins expressifs et une musique pesante particulièrement adaptée, Aztec Challenge pose le décor d'un monde violent et inquiétant, plus proche d'Apocalypto de Mel Gibson que des Mystérieuses Cités d'Or de Bernard Deyriès.

Notre héros doit ainsi surmonter sept épreuves qui sont autant de niveaux proposant chaque fois un gameplay différent, à la manière de Jungle King sorti un an plus tôt, mais avec plus de variété puisque le point de vue de l'action est différent d'une scène à l'autre, proposant des représentations de profil, de dessus ou de derrière. Chaque épreuve est nommée et précédée d'un écran d'introduction présentant ce qui attend le joueur ainsi que les commandes à utiliser. On dispose de cinq vies par épreuve uniquement.

Épreuve 1 : "The Gauntlet"

La première épreuve est souvent la seule qu'ont pu « apprécier » les quelques détracteurs du jeu lorsque ce dernier a été commercialisé pour la première fois... C'est en effet l'une des plus difficiles, sinon LA plus difficile de toute l'aventure. Le héros est représenté de derrière et court tout droit vers le temple ou l'attend la suite de son calvaire. Sur les côtés de la route, des soldats sont postés et lui lancent des javelots vers la tête ou les jambes. Il faut bien entendu les éviter en s'abaissant ou en sautant. Mais les projectiles arrivent de façon aléatoire et surtout très rapidement, obligeant le joueur à réagir au quart de tour sans pouvoir mémoriser le parcours. Pendant ce temps, le temple au fond de l'écran se fait de plus imposant tandis que la musique devient de plus en plus oppressante...

Épreuve 2 : "The Stairs"

Il s'agit ici d'escalader les murs du temple en évitant les chutes de pierres par un déplaçement vers la gauche ou la droite. Bien que les pierres apparaissent encore une fois très rapidement, cette épreuve est largement plus facile que la première. C'est d'ailleurs certainement la plus facile de toutes... mais bien entendu, dans un titre comme Aztec Challenge, cette "facilité" est toute relative.

Épreuve 3 : "The Temple"

À l'intérieur du temple, enfin, il faut maintenant franchir de nombreuses pièces remplies de pièges mortels. On trouvera des trappes sans fond, ou encore des pluies de javelots ou de rochers. Le type de piège qui attend le joueur est déterminé de façon aléatoire, relançant l'intérêt à chaque partie. C'est à mon avis la séquence la plus amusante du jeu. Encore une fois seulement 2 actions sont possibles : s'immobiliser (le héros court par défaut vers la droite de l'écran) ou sauter.

Épreuve 4 : "The Vermin"

Au cœur du temple, le héros doit avancer en évitant les serpents, scorpions et araignées présents sur le sol ou tombant du haut de l'écran. Le moindre contact est bien entendu mortel. Cette séquence est assez étrange car en guise de mouvements, on ne dispose pas d'un, mais de deux sauts plus ou moins hauts et longs, alors que le personnage avance encore une fois tout seul. La détection des collisions est également confuse et l'arrière-plan hideux achève de faire de ce niveau l'un des moins intéressants du jeu, sans toutefois que l'on s'ennuie ou que l'on peste de trop, à condition de surmonter la difficulté.

Épreuve 5 : "Hopaztec"

Imaginez-vous jouer au démineur de Windows mais sans les chiffres qui vous indiquent le nombre de bombes aux alentours... C'est un peu ce qui vous attend dans cette épreuve ! On se déplace dans les quatre directions, en sautant sur des dalles afin d'atteindre la sortie. Mais certaines dalles sont piégées et déclenchent le tir de flèches mortelles. Lesquelles ? On ne sait pas ! MAIS, tant que vous n'avez pas fait usage de toutes vos vies, leur emplacement ne change pas. Il faudra donc de la chance et de la mémoire pour passer cette épreuve.

Épreuve 6 : "Piranha"

Vu de dessus, le héros nage dans une rivière infestée de poissons mangeurs d'homme ! On peut le diriger dans toutes les directions et, pour la première fois, le bouton de la manette est mis à contribution pour plonger quelques instants sous l'eau, ce qui permet semble-t-il de se substituer à la vue des piranhas et éviter que ces derniers ne nous foncent dessus. Oui, ce n'est pas très logique... Cette phase un peu confuse et frustrante est celle que j'aime le moins.

Épreuve 7 : "The Bridge"

Notre héros court toujours dans cette ultime épreuve où il doit traverser un pont de cordes suspendu au-dessus du vide. Il avance tout seul encore une fois, et le joueur doit le faire sauter au bon moment par dessus des trous de différentes longueurs avec trois types de sauts (attribués à des directions différentes sur le joystick) : petit, moyen et grand. Il faut faire preuve de sang-froid et de précision pour réussir cette séquence que je trouve très bien exécutée.

Une fois les sept épreuves réussies... on recommence au début avec une difficulté (encore) plus élevée ! Il y a ainsi quatre boucles à réaliser, proposant parfois de petites différences graphiques (la nuit tombe). Et lorsqu'enfin vous parviendrez au bout de la 4ème boucle (ce qui, honnêtement, me semble surhumain sans tricher), vous aurez droit à, oh suprême récompense... un retour à l'écran titre ! Ah, le bon vieux temps...

Simpliste, Aztec Challenge ? Oui, mais addictif !
Moche, Aztec Challenge ? Oui, mais quelle ambiance, surtout grâce à cette musique, qui accompagne formidablement l'action en faisant monter la pression au fur et à mesure qu'on approche du but.
En fait, le jeu apporte juste ce qu'il faut pour stimuler à la fois l'imagination du joueur et sa motivation pour persévérer et atteindre la fin de l'aventure, découvrant au passage sans cesse des nouvelles épreuves.

La version Amiga

En 1993, soit dix ans après la sortie initiale du jeu, une version Amiga tout à fait non-officielle (et certainement non-autorisée) est sortie dans le domaine public. Elle était distribuée (entre autres) sur les fameuses disquettes « Assassins » proposant de nombreux logiciels freeware ou shareware.
Absolument remarquable, cette version légèrement améliorée graphiquement (juste de quoi rendre l'action plus lisible et le tout plus agréable) et au gameplay ultra-fidèle dispose d'un ajout très appréciable : un mode deux joueurs simultanés. Très bien implémenté et permettant au second joueur d'incarner une esclave aztèque de sexe féminin (une inspiration venue de la jaquette du jeu original ?), c'est une vraie valeur ajoutée qui renouvelle l'intérêt du jeu et en fait à mes yeux une sorte de version définitive que je recommande chaudement aux fans de l'original.
D'ailleurs, quelques remakes et homebrews sont sortis par la suite, mais à mes yeux aucun n'est aussi intéressant que ce portage Amiga.

Aztec Challenge sur Atari 8bits et Vic20

On peut lire sur l'écran de chargement de Aztec Challenge qu'il est fondé sur un jeu réalisé par un certain Robert T Bonifacio. Il s'agit en fait d'un jeu également nommé Aztec Challenge, sorti quelques mois plus tôt sur les micro-ordinateurs Atari 8 bits et sur le Commodore Vic20, et édité également par Cosmi. Bien que l'histoire et le principe soient totalement identiques, les épreuves que doivent passer le héros sont elles différentes. En fait, il s'agit ici d'amener le héros au bout de chaque niveau alors que ce dernier, vu de côté, court droit devant lui et que le joueur doit lui faire éviter de nombreux obstacles en le faisant sauter au bon moment et de trois manières différentes. Il s'agit d'un mélange des épreuves "The Bridge" et "The Vermin" de la version Commodore 64.
Selon toute vraisemblance, le Aztec Challenge bien connu et bien aimé du C64 est à la base une conversion de cet obscur Aztec Challenge de Robert Bonifacio. Obscur car sa jouabilité approximative et son niveau de difficulté abusé l'ont bien vite effacé des mémoires (sans parler d'une réalisation très faible, particulièrement sur Vic). Dommage car il y avait de bonnes idées, comme un mode deux joueurs simultanés (sur Atari).

En conclusion : peut-on penser qu'il faut avoir connu Aztec Challenge en 1983 pour l'apprécier encore aujourd'hui ? Oui, certainement. Sa réalisation graphique risque d'en repousser beaucoup, même si le premier niveau, sobre et lisible, dispose d'un effet de profondeur très sympathique. Malgré tout, le challenge reste addictif : donnez-lui donc sa chance, et essayez de voir jusqu'où vous pouvez aller !

Sebinjapan
(04 juin 2012)
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