Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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Par MTF (04 juillet 2017)
Crash Bandicoot 3: Warped est sans doute l'un des jeux sur lesquels j'aurais passé le plus de temps sur Playstation, première du nom. Paradoxalement cependant, il est loin d'être mon jeu favori sur la machine, du moins je lui préfère très volontiers le deuxième épisode dont je vantais ici-même la belle perfection et sa rondeur épatante. Crash Bandicoot 3 pèche pour moi par excès, ce qui est certes compréhensible pour le chant du cygne qu'il peut représenter mais qui m'empêche, hélas, de l'apprécier totalement. Je suis de retour !Encore une fois, débarrassons-nous rapidement de l'histoire du jeu. Après que Crash a détruit la station orbitale du Docteur Neo-Cortex, cette dernière s'écrase sur un temple antique. Le choc libère ainsi Uka-Uka, l'alter-égo démoniaque d'Aku-Aku, le gentil masque qui aidait le marsupial dans ses aventures. Uka-Uka en profite pour s'associer au docteur et, pour fomenter un énième plan diabolique, fait appel au professeur N-Tropy. Ce dernier a inventé une machine temporelle leur permettant de visiter sans contraintes le passé lointain et l'avenir incertain. L'objectif ? Récupérer des cristaux et des gemmes pour alimenter un rayon destructeur, bien entendu ! Désactivant les premières critiques, et malgré sa durée de développement réduite (dix mois à peine), ce troisième épisode du marsupial est, au commencement, une très, très agréable surprise. Contrairement à Donkey Kong Country 3, licence à laquelle l'on comparait souvent Crash Bandicoot, l'on ne peut que constater l'évolution technique et considérer ce troisième épisode comme le mieux réussi, du moins du point de vue plastique. Les environnements sont chaleureux et colorés, l'animation sans pareille, les musiques détonnent et sans se départir de leur inspiration « cartoon », sont souvent davantage qu'un simple accompagnement. On retiendra notamment le thème de l'Égypte antique et celui de la cité futuriste, que j'écoute encore régulièrement dans mon salon. À cette évolution viennent s'ajouter quelques petits éléments augmentant davantage le plaisir de la traversée et qui font de cet épisode, du moins c'est ainsi qu'il apparaît sans doute, le « must have » du genre sur la console. Notamment, chaque niveau a à présent un défi du type « contre-la-montre », avec plusieurs fenêtres très serrées à respecter pour décrocher la meilleure récompense et le jeu propose surtout un système de power-up assez intéressant. En fait, à chaque fois qu'un boss est vaincu - y compris l'ultime, du moins lors de notre première traversée du jeu -, Crash peut effectuer un mouvement supplémentaire venant s'ajouter à la toupie et au saut-pilon qu'il possède au commencement. Il pourra notamment utiliser un double-saut ou profiter d'une tornade augmentée, lui permettant de planer au-delà de grands gouffres. Les persévérants débloqueront même un bazooka à pommes, de quoi faire des ravages autour de soi ! Y'en a un peu plus, je laisse ?Si l'on ne peut donc nullement attaquer le jeu sur sa jouabilité, son contenu, sa variété ou son challenge, il y a cependant, ce me semble, un côté captieux à sa construction et à sa difficulté roublarde, car élevée sans y paraître, généreuse mais exigeante, et qui explique le paradoxe dont je faisais état en début d'article. Après avoir battu le jeu une première fois, et débloqué les chaussures de course permettant de filer à toute berzingue, nous sommes invités à récupérer les différents secrets du jeu pour accéder à la « vraie » fin, comme c'est là la coutume dans ce genre de jeu. Sauf que cette fois-ci, le challenge est on ne peut plus compliqué, terrible, irréalisable même. Autant je ne renâcle jamais à la tâche lorsque viennent ces complétions particulières, autant, ici, ai-je dû m'incliner devant les manigances des développeurs. Non : la difficulté principale du jeu vient des nouveaux éléments introduits et qui, je pense, n'ont pas fait l'objet du même soin, du moins d'un soin suffisant, pour les intégrer agréablement au reste. Il en va ainsi des time attack, qui sont cruels de précision et ne laissent aucunement droit à l'erreur : quand bien même le jeu n'exigerait-il point les ultimes reliques, de couleur platine, pour débloquer les derniers niveaux, se contentant pour ce faire de n'importe laquelle d'entre elles, il est déjà compliqué de récupérer ces trophées dans les niveaux aériens ou aquatiques qui, par leur principe même, se prêtent mal à l'exercice et exigent une bonne dose de chance pour réussir. Il en va encore des passages secrets, nécessaires pour obtenir les dernières caisses de tel ou tel niveau, qui obligent à revenir sur ses pas pour rejoindre le cheminement normal du stage et qui sont d'une maniabilité délicate. La palme revient ainsi à ce niveau futuriste, l'un des tous derniers, qui exige, après avoir brisé deux ou trois caisses secrètes, de refaire la quasi intégralité du stage à l'envers, avec une visibilité réduite, pour détruire les caisses régulières avant de refaire le niveau normalement une troisième fois et, enfin, acquérir la gemme cachée. La chose n'est ni ingénieuse, ni agréable, et ce genre d'écart répété n'invite pas à se plonger dans les derniers méandres de l'aventure. Je ne suis effectivement pas de ceux qui pensent qu'une suite doit perpétuellement offrir davantage pour plaire, et j'ai souvent montré ici qu'au contraire, les développeurs pouvaient souffrir d'hybris et mourir d'orgueil. Il en va par exemple de Donkey Kong 64, qui voulait être le période d'un genre et qui lasse par sa multitude ; de Paper Mario : La Porte millénaire, qui se répète et s'enfle jusqu'à la parodie de lui-même, même si je sais cet avis peu populaire ; et quitte à se faire haïr, je rajoute qu'il en va de même, pour moi, concernant Crash Bandicoot 3: Warped. Le deuxième épisode était parfait, car il savait où s'arrêter, et comment s'arrêter. Il définissait ses bornes, s'y tenait et proposait des explorations malignes de son principe sans outrepasser ses limites. Ce troisième épisode, grandiloquent dans ses idées, dans sa variété avec ses quatre, cinq, six gameplay distincts, son monde caché, ses challenges exigeants, ses niveaux secrets, donne l'impression d'être comme illimité, perpétuellement relançable et relancé, sans objectif clairement atteignable : une aventure infinie, pour ainsi dire. Crash Bandicoot 3: Warped illustre, si je devais finir par là, un écueil régulier des « suites de suites » : la tension entre la continuité installée par les épisodes précédents et exigée par une base fanatique de joueurs, et le renouvellement demandé par les développeurs qui, on les comprend, ne sont guère excités à l'idée de refaire une troisième fois la même chose. Naughty Dog laisse alors un cadeau en forme d'adieu, et effectivement : ils délaisseront la plate-forme linéaire au profit de jeux de course (Crash Team Racing) ou d'aventures ouvertes ou semi-ouvertes (Jak & Daxter, Uncharted). Il y a donc là quelque chose du jeu de transition, de l'œuvre de commande faite sérieusement, mais sans appétence aucune. Si vous le trouvez, ou si vous le retrouvez, jouez-y donc et amusez-vous : mais abandonnez-le lorsqu'il deviendra travail, sous peine de transformer le plaisir en douleur. Envie de réagir ? Cliquez ici pour accéder au forum |