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Kabuki : Quantum Fighter
Année : 1990
Système : NES
Développeur : Human corporation
Éditeur : HAL Laboratory
Genre : Plate-forme / Action
Par Jean-Christian Verdez (26 janvier 2003)

Hal, à qui l'on doit notamment des jeux comme les Kirby (Kirby's adventure, pour ne citer que le meilleur) ou plus récemment Super Smash Brothers sur N64, nous proposa en 1990 un jeu qui n'a pas marqué les foules mais qui contrairement à la croyance populaire de l'époque, n'est pas raté. Développé par Human corp sur la célébrissime 8-bits de Nintendo, intéressons-nous donc aujourd'hui à Kabuki: Quantum fighter.

Dans un futur proche : l'ordinateur du Ministère de la défense chargé de protéger toute notre planète (rien que ça !) a été contaminée par un virus particulièrement dévastateur, d'autant que celui-ci ne cesse d'évoluer. Il n'y a qu'une personne au monde qui puisse régler ce problème et ainsi sauver le système de défense de la Terre, le colonel Scott O'Connor. Grâce à un procédé révolutionnaire nommé IST (pour Image System Transfer), et qui n'a jamais été testé, notre héros va être « converti » en données informatiques pour être transféré au sein même des circuits de l'ordinateur infecté, ce qui lui vaudra le surnom de Quantum Fighter, le combattant de l'infiniment petit. Par ailleurs, une fois dans l'ordinateur Scott O'Connor n'a plus sa véritable apparence mais s'est curieusement retrouvé transformé en un Kabuki, tout comme l'était l'un de ses ancêtres. (Pour info, le Kabuki est une forme du théâtre traditionnel japonais apparue au début du 17ème siècle, dans lequel les comédiens se travestissent d'une façon très singulière - voir photo - et jouent en exagérant leurs mouvements. La musique a une part importante dans les représentations, et on notera aussi le fait que pendant près de 250 ans les comédiens étaient tous des hommes, y compris pour tenir les rôles féminins, et que cette état de fait persiste encore de nos jours... Mais refermons cette longue parenthèse pour revenir à l'époque des gros pixels)

Le scénario de Kabuki: Quantum Fighter est un tantinet tiré par les cheveux si vous me permettez l'expression, mais ce n'est comme d'habitude qu'un prétexte, aussi intéressons-nous plutôt au déroulement du jeu. Il s'agit ni plus ni moins d'un jeu de plates-formes, divisé en 6 niveaux, tous peuplés d'ennemis divers : des petits tanks qui accélèrent à votre approche, des robots-cafards peu rapides mais très résistants, des lanceurs de boomerangs, de fléchettes, des lance-flammes, bref toute une panoplie de gens pas recommandables mais qu'il vous faudra malgré tout affronter.

Pour les battre, vous allez utiliser une arme pour le moins inhabituelle : vos cheveux. En effet, votre personnage est pourvu d'une tignasse qu'Antoine n'aurait certainement pas reniée. D'un majestueux mouvement de tête, vous aller ainsi pouvoir éliminer vos adversaires grâce à ce fouet crânien rougeoyant. Assez efficace en combat rapproché, cette technique s'avère en revanche complètement inutile pour les ennemis situés trop loin (O'Connor a des cheveux long, mais pas extensibles). Heureusement plusieurs types d'armes sont à votre disposition. Vous commencez le jeu avec un stock de puces électroniques, que vous pourrez jeter sur les ennemis. Puis au fur et à mesure du jeu vous allez gagner un canon à fusion qui permet de tirer un missile droit devant vous, des Bombes Quantiques qui partent dans 3 directions, de la dynamite à lâcher lorsque vous êtes en l'air, ou encore un bolo (machette des Philippines si je ne m'abuse) qui peut partir dans plusieurs directions. Certaines armes sont plus puissantes que d'autres, et leur portée diffère aussi... Mais vous ne pouvez pas utiliser ces armes comme bon vous semble : sous votre barre d'énergie se trouve votre stock de puces électroniques, et toutes les armes en consomment un nombre plus ou moins important. L'utilisation d'armes à distance vous coûtera donc plus ou moins cher, il y faudra bien les sélectionner suivant les circonstances afin d'économiser aux maximum votre réserve de puces pour affronter chaque Boss. Heureusement, il est tout à fait possible de se réapprovisionner au cours du niveau grâce aux items laissés par les différents adversaires que vous éliminerez.

certains passages sont de la plate-forme pure

À noter aussi une option très intéressante qui pourrait bien vous sauver la mise plus d'une fois : lors des combats avec les boss de fin de chaque niveau, en mettant le jeu en pause vous pourrez appuyer sur haut ou bas afin d'échanger des points de vie contre les puces électroniques que vous avez en réserve (c'est toujours frustrant de perdre alors qu'il ne restait qu'un point de vie à l'adversaire).

Personnellement j'aime beaucoup ce jeu. Les graphismes, sans être époustouflants, ne déshonorent pas la NES, les animations sont globalement réussies (comme par exemple certains éléments qui constituent le décors) et le jeu ne souffre jamais du moindre ralentissement. Les musiques sont elles aussi de bonne facture, non pas qu'elles soient inoubliables mais elles correspondent bien à l'atmosphère de KQF et ont quelque chose de motivant. Bref voilà une cartouche 8-bits fort sympathique. Malgré tout, ce jeu n'a pas eu les ventes qu'il était en droit d'espérer à l'époque, et les critiques à son égard étaient (et sont toujours) généralement rudes. Ceci est dû à une difficulté que beaucoup ont jugé exagérée. En fait, le jeu n'est pas si dur que ça : une fois que l'on connaît les déplacements des ennemis ainsi que les techniques pour parvenir à bout des boss, les trois maigres vies de départ se révèlent suffisantes pour terminer le jeu, à condition d'être très rigoureux dans l'utilisation des différentes façons d'éliminer ses ennemis (notamment avec une utilisation parcimonieuse des armes). Bon par contre il faut bien admettre que le niveau le plus difficile est le 3ème : le moindre de vos mouvement doit être calculé au millimètre, à la milliseconde. Certains sols sont constitués de glace, et glissent, rendant les sauts particulièrement délicats. De plus, ce niveau est vertical et certains passages finissent par devenir très exaspérants (un monstre intouchable vous fait rater une plate-forme et vous retombez un peu plus bas dans le niveau, vous remontez pour lui montrer qui commande mais une fois de plus vous ratez votre saut, et ça continue [encore et encore...]). Cela dit, la difficulté contraste fort logiquement avec un jeu assez court (6 niveaux), et Kabuki n'est donc pas interminable. Il faut simplement être très méthodique (les plus mordus du genre pourraient même le trouver facile !).

Bon par contre si j'avais une petite critique à émettre histoire de couper les cheveux en quatre, elle concernerait le héros. Un Kabuki défenseur des temps numériques futurs c'est très bien, mais même si à l'époque je me moquais éperdument de ce détail, rétrospectivement je me dis qu'il est dommage que cela n'influence en rien le gameplay ni l'environnement (environnement qui d'ailleurs ne ressemble en rien à ce qu'on serait en droit d'imaginer pour un intérieur d'ordinateur). Oui, bien sur, il y a le coup de l'attaque « capillaire » que l'on pourrait associer aux mouvements exagérés des acteurs Kabuki... mais l'originalité s'arrête là. Si les développeurs avaient poussé le concept un peu plus loin, je pense que cela n'aurait été que mieux (remarquez, d'une certaine manière on pourrait faire le même reproche à un certain Mario, plombier de métier qui pourtant n'utilisera pas le moindre tuyau d'eau pendant des années).

Dès la sortie de Kabuki: Quantum Fighter, une suite était déjà envisagée (on en voit d'ailleurs l'annonce à la fin des crédits du jeu). Mais celle-ci, sans doute à cause de l'échec commercial du présent épisode, ne verra jamais le jour.

Jean-Christian Verdez
(26 janvier 2003)
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