Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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Par Corentin M. (03 décembre 2003)
En décembre 1994, pour le lancement de la Saturn, Sega et Team Andromeda commercialisaient Panzer Dragoon, un majesteux shoot’em up aux graphismes et au design de toute beauté. Fin 1996, on remettait ça, avec Panzer Dragoon Zwei. Une fois de plus, il s’agissait d’un shoot’em up de très grande qualité. Mais en mai 1998, pour le troisième opus de cette saga devenue mythique en l’espace de seulement deux épisodes, bien des choses ont changé. L’univers de Panzer Dragoon est sublimé. Les deux premiers épisodes de Panzer Dragoon ne manquaient pas de qualités, bien au contraire. Mais le jeu ne semblait étrangement pas à la hauteur de lui-même. On devinait en effet, au-delà du simple jeu de tir, au-travers du design proprement sidérant des créatures et des décors, ainsi que des cinématiques de toute beauté, une aventure à la richesse infinie qui ne demandait qu’à être enfantée. C’est ainsi que le projet Panzer Dragoon Saga fut porté sur les fonts baptismaux. L’univers de Panzer Dragoon ne demandait qu’à être approfondi, dessiné, animé, en un mot, il ne demandait qu’à vivre. Pour cela, le type de jeu le plus approprié était le RPG. Mais pas n’importe quel type de RPG. Sûrement pas un tactical-RPG, Panzer Dragoon Saga ne devant surtout pas se cantonner aux combats. Non, il fallait établir un système de jeu plus proche de l’action-RPG à la Zelda, tout en en approfondissant les mécanismes. Ainsi le jeu s’articule-t-il autour de grandes phases de recherche à pied ou à dos de dragon, entrecoupé de fréquents combats aériens gérés en temps réel et non au tour par tour. Extrêmement bien pensé, le système de combat se base sur l’évolution de votre monture qu’il faut gérer très précisément. En fait, un génial système de morphing en temps réel du dragon se fait selon la répartition d’un capital de points entre quatre catégories : attaque, défense, agilité et spiritualité. Tout le problème est de déterminer s’il vaut mieux avoir un dragon « moyen » pour apprendre tout type de sort et de technique, ou bien le spécialiser à fond au risque de se faire laminer contre un boss qui serait votre plus parfaite antithèse, ou encore de systématiquement spécialiser son dragon en fonction de l’ennemi rencontré, au risque certain d’en freiner la progression. Les sorts et techniques appris enflamment souvent l’écran d’une tornade d’effets visuels renversants, mais, surtout, ils ne sont jamais anodins. Loin de ces jeux où l’on utilise trois sorts sur la centaine possible et puis basta, Panzer Dragoon Saga demande une réelle finesse dans le gameplay, et ce bien que certains boss soient répétitifs, afin de s’en sortir en beauté. Raison de plus en tous cas pour revenir au jeu une fois terminé, pour concevoir un tout autre dragon et apprendre de nouvelles techniques. Le jeu propose en plus une importante quantité de quêtes annexes jamais artificielles (qui a dit Zelda ?) qui permettent véritablement d’enrichir les relations avec les personnages du jeu, d’en découvrir plus sur ce monde absolument enchanteur, et, forcément mais cela en devient presque beaucoup moins intéressant, faire évoluer sa monture. Rares sont les jeux à avoir atteint un tel niveau de richesse et d’immersion. Tout cela est appuyé par une formidable démonstration des capacités d’une Saturn tout à fait sous-estimée. Le travail sur les textures, l’animation et la modélisation sont surprenants. Les effets spéciaux sont quant à eux proprement sidérants : la mer, d’un bleu argenté, ondulant sous le navire de la zone interdite, le désert et ses tempêtes de sables, le tunnel sous-marin à Uru, le vortex avant Sestren, les effets pyrotechniques et lumineux... un véritable sans faute graphique mais aussi artistique qui, aujourd’hui encore, reste des plus enchanteurs à contempler. Situé chronologiquement après les deux premiers jeux, dans un monde post-apocalyptique où les hommes ont perdu le contrôle d’une technologie d’armes biomécaniques, Panzer Dragoon Saga narre l’aventure d’Edge, jeune homme pourchassant l’Empire pour avoir assassiné les siens suite à une étrange découverte archéologique. Une jeune femme prisonnière de la roche depuis des millénaires vient en effet d’être exhumée de son carcan de pierre et de métal, sur le site de recherche gardé par des hommes payés par l’Empire. Edge est l’un deux. Précipité dans un gouffre durant le raid, il ne s’en sort que de justesse. À peine revenu à lui, il est attaqué par de sombres créatures. Il ne sera sauvé que par l’intervention du Dragon qui l’a choisi pour nouveau maître. Ainsi commençe le jeu. Dès lors Edge se lance à la poursuite de l’Empire. Le joueur découvre, lui, un monde gigantesque, peuplé d’étranges créatures au design étonnant, où l’homme se fait rare. Tout est à découvrir, à comprendre. Les décors ainsi que les musiques sont absolument magnifiques, la palette de couleurs va du gris glacé au rouge brûlant suivant la partie du monde exploré. Tout est sujet à l’émerveillement. Les personnages rencontrés ne sont jamais de simples faire-valoirs, chacun à sa propre histoire, sa propre personnalité, sa propre raison d’exister. Au cours de son périple d’une longueur et d’une densité proprement colossales, le joueur découvre petit à petit les tenants et les aboutissants de l’histoire. Personne n’est ni tout blanc ni tout noir. On voit le héros, Edge, changer. Sa personnalité s’affine, ses jugements se font plus juste, sa motivation moins aveugle, sa relation avec sa monture plus ambiguë que jamais... Sa rencontre avec la jeune femme, Azel, va le changer à vie. Les deux personnages vont se faire la guerre, puis s’allier, emportés par les évènements. L’évolution de leur relation est traitée avec une rare finesse qui confine à la magie grâce à l’utilisation subtile des scènes cinématiques. Subtile car, bien qu’en très grand nombre et souvent très longues, ces cinématiques arrivent toujours à point nommé pour récompenser le joueur qui, exténué après une très longue phase de jeu, difficile et où de nouveaux décors ont été découverts, de nouveaux personnages, de nouveaux rouages de l’histoire, mérite d’en savoir plus. C’est là qu’une scène cinématique de folie se lance, sublimant les décors déjà magnifiques mais jusqu’alors condamnés à rester pixelisés, rapprochant encore plus les personnages, à l’aide de dialogues profonds et jamais ampoulés, pour le plus grand bonheur du joueur qui, sur la fin, succombera littéralement de plaisir et de frustration à la fois. Un instant d’émotion intense, fébrile, qui marque un esprit à vie, et qui fait de Panzer Dragoon Saga un très grand jeu vidéo, une formidable expérience émotionnelle. 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