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Thomson
Ambiance camembert qui obstrue la RS232 et gros rouge qui tâche le clavier-gomme avec ce résumé du parcours de Thomson sur le marché de la micro dans les années 80, et du légendaire "plan informatique pour tous" estampillé Fabius/Chevenement.
(Maudite sois tu, petite anguille !)

MO5

Du 6809E, vous allez en bouffer. En 1984, Thomson nous sort le MO5 ! Yeah ! Et c'est encore notre microprocesseur vedette qui s'y colle ! Il a 48 KO de RAM et 16 Ko de ROM et il nous affiche du 320*200*8 couleurs !... Hey mais crotte, ces caracteristiques me rappellent quelque chose... HEY MAIS... MO5 ! Tu ne serais pas un TO7/70 déguisé par hasard ?!

En fait, si le CPU reste le même et la RAM reste identique, le MO5 est un départ nouveau par rapport au TO7. C'est quasiment un TO7/70 tout en ne l'étant pas et avec un prix moins élevé (3500 francs au lancement). Enfin, on peut supposer que le BASIC de Microsoft a été optimisé de façon conséquente. Le MO5 avait des capacités d'extension plus importante (extension mémoire de 64 ko, lecteur de disquette...) , mais l'immonde et inutile crayon optique était toujours la, ainsi que ce foutu clavier à gomme.

(Diantre !!!! Shocking ! Microsoft doit tout a la France...)

Si les capacités étendues du TO7/70 (de part sa RAM) n'ont pas été exploitées pour des raisons de compatiblité, avec le MO5, on allait pas se géner, puisque cette puissance supplémentaire, tout les possesseurs de MO5 l'avaient. Il fallait d'ailleurs ne SURTOUT pas se géner, vu que le C64 et le CPC464 commençaient à arriver, à des prix semblables, et des capacités, théoriquement, toujours inférieures. Allez Thomson, saisis ta chance ! Bouffe ces teutons et fais un sac à main du crocodile ! Ouais ! Vive la France !

(Qu'il est beau ! On dirait une PS2 en version micro !)

Mais tu t'en doutes cher lecteur, ce ciblage uniquement français va connaitre des ratés. Si les développeurs ont les outils pour lutter a armes égales contre les machines étrangères, l'intérêt sera toujours aussi limité par rapport au parc européen qu etout le monde se partage... sauf Thomson. La France contre le reste du Monde.... Asterix..... On imagine facilement les conséquences de cette attitude dans le petit monde du jeu vidéo.

Néanmoins, il ne faut pas éxagérer, le MO5 a été la star de Thomson, et il y avait de quoi, puisque bien que relativement peu fournie par rapport à ses concurrents, cette fois les jeux étaient souvent de qualité. Les capacités de la machine bien mieux exploitées et le BASIC moins utilisé, ou alors de façon bien plus efficace. Les jeux sont plus beaux, plus rapide et plus jouables que sur TO7... bien que restant sur cassettes avec ces fichus temps de chargement. Le MO5 peut être décemment acheté comme une machine de jeu. Ce que mes parents firent pour ma soeur, mais c'est moi et mes 3 ans qui ont commencé à s'en servir, et c'est grace a lui que je suis la a écrire cet article et a surfer sur Grospixels.

C'est beau.

Je vous rassure, j'ai acheté un PC après, je n'écris pas cet article depuis un MO5 (ca m'aurait tué, avec ce clavier à gomme...). Le MO5 est également sorti sous une célèèèèèbre édition collector : le MO5 Platini, dédicacé par... Platini (Encore lui ! Cette fois c'est sûr, il a été puni...). Une autre version plus collector signée par Benard Hinault fut quasiment introuvable.

Magnifique.
Sublime.

En parlant de Platini, que vaut ta ludothèque MO5 ? Et ben c'est déjà vachement mieux. On retrouve pas mal de portages de jeux du TO7, mais aussi pas mal de bonne nouveautés. On commence par Avenger, un sacré bon jeu de Ninja où le MO5 donne toute sa splendeur graphique avec en plus un gameplay travaillé. Le MO5 a eu aussi quelques bons jeux d'aventures comme Balthazar de Titus (une sorte de simulateur de mec bourré), Le Dossier Booerhave (ou les personnages ressemblent étrangement à des hommes politiques français et à un flic à la Colaro (et oui, c'est vendeur)).

Le MO5, c'est aussi des jeux absolument mythiques convertis de façon honorablement, car il y a cent mille ans, le jour se lève. Pigé ? Non ? Allez un screenshot.

Ca, c'était magnique, même sans les couleurs

WAAAHH !! SAPIENS !!! Bon je ne vais pas m'étendre sur ce jeu, il mériterait un article à lui tout seul. Gameplay unique, réalisation splendide, le jeu est un véritable simulateur d'homme prehistorique avec un cycle jour/nuit, où l'on doit chasser (et consommer la nourriture avant qu'elle ne pourrisse), se tailler des silex et des sagaies, discuter avec les autochtones.... Magnifique. Absolument magnifique. Question portage : Renegade, un jeu de baston à la Double Dragon, fut lui aussi un excellent portage. Signalons également un portage trop ambitieux de F-15 Strike Eagle, qui rame comme pas possible. Enfin, finissons par un portage qui tue : Wizball. Une petite boule verte qui rebondit comme une folle.

Wizball et Avenger : de la pure boule verte, et du pur ninja
De la bonne baston sur MO5 ? Yie Ar Kung Fu 2 (façon lent), Karate et le fameux Renegade

Question exclusivité, certains se souviendront d'un truc de dingue qui s'appelait Mandragore : LE RPG du MO5 (et pour cause, c'était le seul), un jeu de OUF qui tenait sur TROIS (3) CASSETTES !!! Ca ressemble beaucoup à un Ultima (c'est même carrément un clone d'Ultima III), et ça nous vient de chez Infogrames.

Dans le genre bon, signalons Jungle Hero, un jeu qui me fait penser un peu à un Jill of the Jungle 8-bits sauf qu'il est sorti avant (mais je doute que les mecs de Epic connaissent bien le MO5), Pulsar II (un clone de Scramble, tout aussi enervant et réussi !) , un jeu de baston tout simple qui s'appelait Karate mais aux graphismes et à l'animation ultra réussie et ultra fun en mode deux joueurs, et un certain Sports d'été, sorte de Summer games du pauvre, qui se défend pourtant bien... On a aussi eu droit aux grands classiques, comme un nouveau Boulder Dash, et un jeu assez étrange, mon tout premier jeu vidéo : Stanley le Concombre. L'histoire d'un concombre qui s'appelait Stanley. J'ai eu une enfance assez étrange par la suite.

Coté sport, il y a aussi eu un jeu de tennis d'anthologie de par son animation de qualité et son gameplay potable (pour un jeu de tennis de l'époque, avoir un gameplay potable, c'est bien). Ca s'appelle Super Tennis, et il y a un truc dedans qui m'a fait rire comme un petit fou : un synthétiseur vocal. L'Arbitre prononçait les scores, les noms des joueurs et tout, mais façon MO5 "Ser-vice-jou-eu-r-1 ... Kinz Zai-ro... E-Ga-Li-Té". A entendre au moins une fois dans sa vie, c'est à des milliards d'années lumiere de Mortevielle ! Mais bon, ce n'est qu'un 8-bits.

Super Tennis et Game Over

Alors, si le MO5 est aussi génial, pourquoi a-t-il laissé si peu de traces ? Parce que même si c'est bien, c'est encore trop peu par rapport à un Commodore 64 ou un Amstrad. Les voila qui arrivent ces 8-bits de légende, et le monde entier développe dessus. La concurrence fait que bien que moins puissants, ils seront beaucoup mieux exploités, avec une ludothèque plus riche. Le MO5 tient,
mais difficilement. Il aura également toute une multitude de logiciels ludo-écatifs d'assez bonne qualités dans l'ensemble. Comme le TO7, le MO5 a eu ses déclinaisons, comme le MO5NR orienté éducation avec un système de "nanoréseau" intégré, un MO5E, destiné à l'exportation (ahahaha la bonne blague, personne n'en a voulu).

Et le MO6 ? C'est pas vraiment pareil. Allez, on passe a la fin de l'article.

TO8

1986 arrive. Le ST et l'Amiga aussi, et les mecs de Thomson n'allaient bien sûr pas rester les bras croisés. Dans le plus grand secret ils paufinent le ultra high tech de la micro francaise: En 1986, Thomson lance le MO6 et le TO8.

Et c'était bien.

Waahhh ! Un lecteur 3 pouces et demi sur le coté ! Comme le ST !

Matez un peu ça : 256ko de RAM extensible à 512 (avec une ROM de 80 et un basic Microsoft, mais on s'en balance. Y'a aussi un semblant d'interface utilisateur, mais elle ne sert à rien), 8 modes graphiques (du 160*200 au 640*200, avec un 320*200*16 parmi 4096 couleurs équivalent a l'Atari ST, et un processeur 6809E a 1 MHz et....AAARGHHHH... Comment ca un 6809E a 1 Mhz ? Ben c'était pas la joie chez Thomson, et peut-être n'avaient-ils pas les moyens de faire un truc révolutionnaire. A moins qu'ils n'aient voulu faciliter le développement en créant une machine assez simple pour que les habitués programment dessus. Mais voila : un processeur 8-bits a 1mhz, face au ST et a l'Amiga qui arrivent... Et des disquettes 3 pouces 1/2 de 640 ko, aussi. La différence entre le MO6 et le TO8 ? Le MO6 est équipé en standard d'un lecteur de cassette, le TO8D d'un truc à disquette, et le TO8 tout court de rien du tout. Le TO9 ne sera rien d'autre qu'un TO8 fait pour avoir l'air sérieux dans un bureau, mais les PCs sont déja là. Enfin, un clavier valable, et toujours un crayon optique (hahahaha) !

L'informatique professionnelle selon Thomson

Non, j'ai beau essayer de me consoler, j'y arrive pas, le 6809E me reste en travers de la gorge. Et ça va se confirmer, car après ce modèle, Thomson ne fabriquera plus que des compatibles PC, avant d'annoncer son retrait de la micro en 1989, tué par sa fidélité à un processeur obsolete ainsi qu'a l'éducation nationale, et par son approche franco française de la micro informatique. Comme ils disent chez eux... "Micro Informatique Grand Public". C'est cela oui... Le TO8 fut une machine bien plus performante que le MO5 proposant des jeux de qualité, mais en retard sur son temps. On fait un petit tour d'horizon ?

Au-delà des portages à l'identique de MO5 (surement la cassette a t'elle été simplement copiée sur disquette), on trouve quelques bonnes nouveautés. Mentionnons par exemple Way of The Tiger (suite d'Avenger mentionné plus haut), un beat them up de folie bien que la maniabilité soit très en dessous d'un Street Fighter II (peut-on vraiment le lui reprocher ?)... Ah ce combat sur le tronc d'arbre ou l'on pouvait perdre l'équilibre à tout instant ! Autre Beat Them All de qualité : Bob Winner, un fight très french touch proposant trois styles de combat dans des environnements à la fois étrange et magnifique.

Bob Winner et Way of the Tiger ... Du Beat 8 Bits !

Le genre "jeu d'aventure" à l'ancienne était également très bien représenté. Si La geste d'Artillac n'impressionne que par ses graphismes, on peut parler également d'une trilogie qui s'appelle Las Vegas assez étrange mais tout de même sympathique a jouer. Egalement L'heritage. Moins interactif, mais un jeu qui a tout autant marqué mes souvenirs : Les passagers du vent, adaptation de la BD. Très peu interactive, mais avec des graphismes et des animations sublimes pour un 8-bits. Egalement Marche à l'ombre, sorti sur bon nombre d'autres machines mais dont la version TO8 est plus qu'honorable. Autre adaptation de BD bizarroide : Iznogoud dans un jeu d'aventure honorable.

Le temple de quauthli, préquelle méconnue de L'Aigle d'Or, et Bivouac, rare (seul ?) bon jeu d'escalade

Parlons également dans le genre aventure de la trilogie des Bob Morane, jeux totalement imbuvables aujourd'hui et presque totalement incompréhensibles a l'époque (a part la version "Science Fiction" qui est un vague Operation Wolf). De meilleure qualité était l'adaptation du plus célebre des Blake et Mortimer : La Marque Jaune, jeu qui lui aussi mériterait presque un article a lui tout seul. Mais il n'est pas le seul, impossible de parler du TO8 sans parler du magnifique et unique Bivouac, simulation d'alpinisme ou l'on part en devant prevoir quoi emmener dans son sac (tout en ne le rendant pas trop lourd), et part ensuite a l'aventure
en faisant attention aux crevasses, tout en devant se reposer de temps en temps sans se laisser mourir de froid, et essayer d'escalader les parois rocheuses... Enfin bien sur, sur TO8 étaient sortis le cultissimme, l'inénarrable, le sublime Captain Blood, ainsi que le merveilleux Spindizzy.

Spindizzy , Silent Service, et l'Arche du Capitaine Blood, certains jeux cultes sortaient aussi sans honte sur Thomson

Coté action/arcade, c'est un peu la deche, comme sur les autres Thomson en fait. A part quelques jeux de Chip (Crepuscule du Naja, 2000 ans avant JC), on ne compte aucun shoot de qualité (a part Mach 3 et TNT (qui assure tout de même un retard face a la concurrence ST/Amiga) ), aucun réel jeu de plate-forme et les jeux "speed" comme Space Racer et Turbo Cup manquent sérieusement de peche... ils sont même lents comme pas possible.. En fait, plus on y pense, plus la ludothèque du TO8 fait un drôle d'effet. D'un point de vue technique a peu près équivalente a celle d'un C64 très bien exploité (encore que ! Ca dépend vraiment des jeux utilisés pour la comparaison), de gameplays souvent originaux, il manque un truc.... La pêche.

Voila, la ludothèque du TO8 manque de pêche. Cette même pêche qui était absente sur les machines précédentes. Les jeux n'y sont pas très rythmées a part certains, l'animation et la maniabilité des jeux d'action/arcade est souvent hasardeuse par rapport a un C64/Amstrad , du coup on se retrouve avec une machine puissante mais sous exploitée, avec quelques excellents bons jeux "dans leur genre", mais toujours refermé sur la France. Les grands Shoot Them Up du C64 n'arriveront pas sur Thomson, pas même que certains mythiques jeux deplate-forme. Les Thomson auront leur propre style, un style unique qui fait qu'encore aujourd'hui ils gardent un charme indescriptible, mais la ludothèque de autres machines fait cruellement envie quand on est sur Thomson. Même Bruce Lee et Prince of Persia sur Apple II ont cruellement plus de punch. Meme l'Apple II avait Origin software qui a développé un nombre faramineux de bons RPGs. Meme l'Apple II avait des jeux d'aventures semi-textuels semi-graphiques bien au dela de tout ce qui est sorti sur Thomson. La plupart des jeux Thomsons puait l'amateurisme a 100 kilomètres... vous savez, cette amateurisme qui a son charme, qui impressionne, mais qui fait quand même pitié face aux jeux commerciaux des autres machines. On les aime bien les jeux Thomson mais... les jeux des autres machines, on les aime encore mieux.

Aaahhh j'te kiffe !

Et je vous parle même pas de ceux qui avaient une NES.... Alors quand le TO8 arrive, il n'y a plus vraiment de raison d'acheter un Thomson bizarrement, parce que les 8-bits concurrentes ont fait leur preuve, et qu'Atari et Comodorre s'apprete a en remettre une couche... et cette couche la, on la connait bien. Alors on se détourne du Thomson et a nous l'arcade a la maison ! Le TO8 a eu en plus ce défaut incroyable de garder ce même processeur depuis le TO7. Pour certains ce sera une qualité, car il est vrai que le TO8 conserve le charme indescriptible de ses grands frères avec ses jeux relativement uniques, mais c'est une machine d'un autre temps. Les 16-bits sont la, et en 1989, Thomson déclare lui ne plus l'être. Une histoire s'achève et sombre petit a petit dans l'oubli, sauf dans le coeur de ceux qui ont possédé une de ses machines.

Car l'aventure Thomson fut ce qu'on peut appeler un échec réussi. Sa fidélité au 6809E et au marché uniquement français l'a tuée et a empêché de nous montrer tout ce que ce processeur avait dans le ventre. Néanmoins, ce flop commercial et technique a permis de créer une ludothèque étrange et unique sur une série de machines qui l'est tout autant. Et c'est la raison pour laquelle aujourd'hui on frissonne et sourit toujours a la mention d'un 5eme axe, d'un Sapiens, ou d'un Bivouac enfouis dans notre mémoire sous des épaisseurs de Giana Sisters, Ultima V, Shadow of The Beast et Xenon 2... Et ce frissonnement et ce sourire, ils prouvent bien que Thomson, c'était bizarre, mais c'était quelque chose quand même...

L'Education Nationale, elle, jura un peu tard qu'on ne la reprendrait plus.

Mickmils
(11 novembre 2004)
Sources, remerciements, liens supplémentaires :
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