Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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Par Lyle (10 septembre 2007)
L'agent secret est aujourd'hui une figure banale du jeu vidéo. Figure déclinée, grâce au succès de quelques gros titres sortis ces dix dernières années, sur une multitude de variantes allant du virtuose de la dissimulation, sobre professionnel, au soldat d'élite, à la fois armada vivante et concentré de gadgets technologiques. Le thème a permis d'inventer de nouvelles formes de gameplay, devenues institutionnelles. Au point, même, de déborder de leur champ d'application. Au bout du compte, c'est pour toute l'action / aventure que l'infiltration à la Metal Gear est devenu un archétype de séquence. Au début des années 80, on n'en est pas encore là. Les appareils de gameplay proposés ne permettent pas encore au joueur de se prendre pour Roger Moore. « Jouer » à l'espion fait encore partie du fantasme de joueur. Ce n'est d'ailleurs pas pour son choix thématique qu'Elevator Action est devenu un classique de l'arcade des années 80. Incarner un agent secret fut surtout pour Taito un prétexte permettant d'expérimenter le concept que l'on connaît. Quoi de plus naturel pour un héros de jeu vidéo de profiter des avancées techniques ? Après des années à se farcir des échelles, des plates-formes ou des escaliers chaque fois qu'il doit se déplacer sur l'axe vertical, il peut enfin prendre l'ascenseur. Bien sûr, Elevator Action n'a pas inventé le système. Il l'a en revanche suffisamment systématisé pour demeurer un concept unique. La descente d'un building en ascenseur restera à jamais sa propriété vidéoludique. Une autre de ses propositions inspirera d'autres développeurs : les portes. L'idée est moins banale qu'il n'y paraît. Déjà en 1983, le jeu envisage sans le savoir la possibilité d'envoyer le joueur sur un plan autre que celui que l'on voit à l'écran. Voilà l'une des premières occurrences de profondeur dans un jeu intégralement en 2D. C'est bien sûr Rolling Thunder qui reprendra l'idée des portes, donnant au joueur la possibilité de se protéger des tirs ennemis et de s'approvisionner en armes et munitions. Coïncidence, Namco reprend également le thème d'Elevator Action en le développant et dans la seconde moitié des années 80, la figure de l'espion commence à doucement faire son chemin. Avant de voir en détails le gameplay d'Elevator Action, jetons un œil sur ses origines et sur sa descendance. ALBUM DE FAMILLEÀ défaut d'être exhaustif, ce dernier a au moins le mérite d'inclure des membres d'horizons divers, du frère jumeau au lointain cousin. Jugez plutôt : ELEVATOR ACTION, VINGT-CINQ ANS APRÈSUn bon retrogamer doit être un retrogamer intransigeant. La paternité plutôt riche d'Elevator Action ne doit pas nous empêcher de lui faire subir l'épreuve du feu : le jugement posthume dépassionné. Alors, franchement, intéressant à lancer sous MAME ou sur Taito Legends aujourd'hui ? La réponse sera un « oui » nuancé. Dans l'absolu, le gameplay d'Elevator Action est toujours valable. Il s'agit en grande partie d'anticipation : les ennemis tirent systématiquement à vue, une fraction de seconde après vous avoir aperçu. Prendre ses marques consiste dans un premier temps à « sentir » cet instant critique qui fait perdre de nombreuses vies lors premières parties. Le timing requis est plus précis encore dans le cas où l'ennemi décide de viser en dessous de la ceinture, le saut de personnage étant particulièrement lent et la marge d'esquive réduite. Il faut en même temps regarder partout à l'écran pour trouver le meilleur itinéraire, sachant que dans les niveaux avancés, l'architecture des bâtiments devient particulièrement tordue. À cela, ajoutez la gestion des portes rouges (leur emplacement change d'une partie à l'autre), derrière lesquelles il vous faut récupérer des documents, ainsi que l'apparition constante et aléatoire de l'ennemi via n'importe quelle porte bleue, et vous comprendrez à quel point Elevator Action est un jeu difficile. On peut ne pas adhérer au gameplay austère et exigeant d'Elevator Action mais impossible de nier son originalité et son intérêt. Sur la plan de la maniabilité, en revanche, on se montrera légitimement plus critique aujourd'hui. La raideur des commandes a quelque chose d'agaçant. On se surprend à appuyer comme une brute sur les boutons, le stick ou la croix directionnelle pour être sûr que le personnage fera ce qu'on demande de lui. Il y a parfois un petit temps de latence avant de franchir une porte et de descendre un escalator. Or, dans un gameplay nécessitant une telle précision, ce court instant peut être suffisant pour décaler tous les plans du joueur, voire lui être fatal. Cette grande lourdeur dans les réactions du personnage constitue l'aspect véritablement archaïque d'Elevator Action, le facteur qui condamnera la rom à n'être qu'un nom parmi des centaines d'autres sur un frontend pour la plupart des joueurs. Finalement, Elevator Action se retrouve un peu dans le même cas que Kung-Fu Master arcade : un excellent concept vieilli par la raideur de son exécution. De même que la conversion Famicom de Kung-Fu Master, bien plus souple, corrige ce défaut, les diverses versions Gameboy d'Elevator Action (dont le EX sur GBC et le Old & New sur GBA) le rendent déjà plus attrayant. L'autre moyen de connaître Elevator Action dans de plus favorables dispositions, c'est de brûler les étapes. Disons-le franchement, à moins d'être un retrogamer ascète ou historien, vous pouvez sans trop de culpabilité passer rapidement sur Elevator Action - n'hésitez pas à faire quelques parties tout de même - pour vous adresser directement à son rejeton : Elevator Action Returns, fils unique à la fois génial et pas tout à fait légitime. Suivez le guide.
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