Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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Par MTF (30 mai 2011)
Il y a des jeux qui affichent la couleur, directement. À peine les premières
minutes sont-elles passées que l'on sait que tel jeu Kirby sera
une promenade de santé, que Final Fantasy VI sera épique,
qu'Another World sera d'une difficulté honteuse. Et il y en a d'autres
qui se terrent, qui se dissimulent, qui s'ignorent, pourrait-on même dire.
Super Mario RPG est de ceux-ci. D'apparence enfantine, au challenge
que l'on peut juger, de façon hâtive, inexistant, il est comme silène
et dissimule des trésors à qui aura la patience, et le goût,
de l'éprouver. À marquer d'une pierre blancheSi ce jeu est d'ores et déjà exceptionnel, c'est qu'il est la conjonction de nombreuses « dernières » et « premières » fois, notamment :
Etc., etc. La liste pourrait continuer longtemps encore. D'un point de vue « historique »
pourrait-on dire, Super Mario RPG fait figure de Napoléon dans la
fresque des jeux vidéo sur console ; il n'a l'air de rien, il est
assez petit mais sans lui, rien n'aurait été fait. Je dis cela en
connaissance de cause : car comme vous vous en apercevrez, le jeu introduit
un certain nombre d'éléments maintes fois repris dans les épigones
de Super Mario RPG, que ce soit la série des Paper Mario
ou des Superstar Saga. Un air de déjà-vu...
L'histoire commence paisiblement. Non loin de la maisonnée de Mario, la
princesse Toadstool se repose en cueillant des fleurs. Soudain, le ciel s'assombrit
et une mystérieuse figure fend le ciel pour l'enlever... Il s'agit de Bowser,
dans son ULM à face de clown ! Ni une ni deux, Mario laisse sur le
feu sa soupe de champignons et se rend immédiatement dans le château
du susnommé. Après avoir affronté quelques tortues guère
résistantes, le plombier s'engage dans un combat épique. Ce dernier
se déroule dans les hauteurs de la salle du trône : tandis que
la princesse est ligotée au plafond, les adversaires se toisent, chacun
sur un chandelier. Tout à coup, un tremblement de terre ébranle le château. Une épée aussi géante que mystérieuse fend le ciel, ne manquant pas de disperser à des kilomètres d'elle sept étoiles colorées. Le choc rapatrie Mario dans sa maisonnée, mais il repart immédiatement à l'attaque. Et tandis qu'il se retrouve au-devant de la porte du donjon, l'épée lui parle... Elle clame l'appartenance de ce domaine au nom du « Smithy Gang » et d'un clignement de cil, détruit le pont de pierre, seul chemin d'accès. Contraint de reculer, Mario va devoir trouver le moyen de revenir au château et de délivrer la Princesse.
L'aventure menée par Mario sera riche en rebondissements. S'avançant
tout d'abord vers le Royaume Champignon, il y fait la connaissance d'un curieux
personnage qui ressemble à un nuage, Mallow, qui lui affirme être
un têtard et qui l'accompagnera dans son épopée. D'autres
héros les rejoindront : Geno, une poupée à qui la vie
fut miraculeusement donnée, la Princesse elle-même et le roi des
Koopas en personne, bien décidé à dégager cette épée
de son beau château. Un air de déjà-vu (de trois-quarts)...
Commençons par ce qui frappe immédiatement en jouant à Super
Mario RPG, et ce qui lui confère cette patte si particulière,
à savoir ses graphismes. La vue choisie par les développeurs est
une perspective cavalière que connaissent bien les habitués de Solstice ou de Landstalker. Si j'en vois sourire, les autres sans doute serrent
les dents, et avec raison. Il faut un temps d'adaptation certain pour naviguer
dans les nombreuses zones du jeu, et s'habituer à la correspondance entre
le pad et l'écran. Encore, les choses sont plus agréables qu'ailleurs,
car les directions enregistrées correspondent à la direction prise
par Mario : la touche haut le fait monter verticalement, la touche droite
horizontalement etc. ; il faudra ainsi s'habituer à utiliser énormément
les diagonales. Si le coup est pris assez rapidement, cela peut en revanche être
un calvaire dans les phases de plates-formes...
La vue de trois-quarts possède en revanche un charme indéniable
et participe à la création d'un monde très plastique, comme
j'ai pu l'évoquer pour Little Big Adventure. On retrouve là
cette impression étrange de « pâte à modeler »
et de « faux », de maisons de « playmobil »
que j'aime plus que tout. Les univers sont clos, fermés sur eux-mêmes :
impossible d'aller au-delà des limites proposées par le jeu. Le
reste est rempli d'une couleur unie, bleue ou noire le plus souvent, donnant l'impression
que l'ensemble « flotte » dans les airs. Déstabilisant,
mais judicieux, je pense, pour épargner la console qui sans cela aurait
surchauffé. Faisant partie des derniers grands jeux d'envergure de la Super Nintendo,
rien n'a été laissé au hasard : effets de distorsions,
mode 7, magies qui remplissent l'écran, musiques de très bonne qualité...
La dame grise crache ses tripes en un dernier baroud d'honneur et presque quinze
ans plus tard, n'a rien perdu de sa beauté.
Du classique et du baroqueParlons à présent des combats. Le système est classique, il s'agit d'affrontements au « tour par tour » : la statistique de vitesse détermine dans quel ordre les personnages agiront. Lorsque c'est à un des héros de jouer, il a le choix entre quatre menus, correspondant chacun à une touche de la manette :
Cette répartition intelligente permet de ne pas se perdre dans d'interminables
menus, et même d'agir en se concentrant uniquement sur les « commandes
actions ». Élément à présent récurrent
dans les RPG Mario, lorsque le joueur effectue une action quelconque lors d'un
combat, que ce soit une attaque physique, un sort ou l'utilisation d'un objet,
il doit appuyer de nouveau sur la touche correspondante à un moment précis
pour augmenter l'effet prévu : augmentation des dégâts
physiques ou magiques, obtention d'un freebie (l'objet utilisé n'est
pas supprimé de l'inventaire) ou meilleure chance de fuite. Les attaques
physiques des adversaires répondent de la même logique, pour se défendre
cette fois-ci (à l'exception des attaques magiques qui ne peuvent être
bloquées). Connaître ses timings est une nécessité,
car cela permet de progresser bien plus agréablement dans le jeu :
et c'est même parfois la seule façon de vaincre un boss. Si les combats
se font donc au tour par tour, il ne suffit pas d'appuyer négligemment
sur les boutons sans regarder son écran pour remporter la victoire, mais
être toujours attentif à ce que l'on fait. Au cours de l'aventure, vous serez amené à diriger cinq héros. Voici une petite fiche descriptive de leurs caractéristiques, et des magies gagnées en cours de jeu : celles-ci sont obtenues à des niveaux précis, plus ou moins similaires pour tous. MarioMario, le seul, l'unique, le véritable héros de cette aventure !
Ses armes de prédilection oscillent entre le coup de poing pur et dur,
le marteau ou encore la carapace de tortue. Personnage plutôt polyvalent,
il est bon à la fois en attaque physique et en attaque magique. L'orientation
de ses statistiques se fera donc selon votre style de jeu. Je préfère
personnellement ses attaques physiques, qui font des dégâts convenables
à tous, sauf contre les ennemis immunisés à celles-ci évidemment.
MallowUn curieux personnage qui ressemble à un nuage et pense être un grenouille. Premier compagnon de route de votre aventure, Mallow est très faible physiquement. Il est en revanche un mage accompli, qui maîtrise trois éléments : la foudre, la glace et les étoiles (qui fonctionnent contre toutes les affinités). Indispensable en début de partie, je l'ai cependant rapidement délaissé en faveur de Peach.
GenoUne poupée devenue vivante grâce à un sort magique. Personnage également très porté sur les sorts d'attaque, je ne l'ai pourtant jamais réellement trouvé utile... Mais il faut dire que j'ai un style de jeu plutôt « rentre-dedans ». Si vous êtes fanatique des sorts magiques, c'est le personnage à utiliser plutôt que Mallow. Ses sorts, sauf Geno Whirl (élément vent) n'ont pas d'affinités élémentaires.
BowserLe roi des Koopas est le « tank » de cette aventure. Pas la peine d'utiliser ses sorts magiques (il n'en a que quatre du reste), il faut qu'il ait un maximum de vie et de force. Il se battra à la force de ses poings, avec des boules à piques... ou en jetant Mario sur ses adversaires !
ToadstoolLa princesse champignon se joindra à vous rapidement dans l'aventure, et elle est le personnage de soutien de l'équipe, aux nombreux sorts de soin. Il est possible de l'équiper pour la rendre quasiment insensible à tous les dégâts, et elle vous sauvera la mise plus d'une fois.
Étant
donné que Mario fera constamment partie de votre groupe, vous aurez, en
fin de partie, deux combinaisons réellement viables : Mario, Bowser et Peach, mon équipe de prédilection, orientée
vers les coups physiques ; ou alors Mario, Geno et
Peach, orientée vers les sorts magiques. Mallow, hélas ! fait rapidement pâle figure et reste à
mon sens le personnage le plus faible du jeu, que ce soit en attaque ou en soutien.
Comme on peut le voir, le titre nous encourage réellement à choisir
entre deux styles de jeu, et l'on ne retrouve donc pas dans la personnalisation
des équipes la liberté que j'évoquais à l'échelle
du personnage.
L'art d'être mal à l'aise...
Après ce long point sur les héros, venons-en au bestiaire que composent
nos ennemis. Ceux-ci, comme on peut s'en douter, proviennent d'une large part
du monde du plombier : on ne s'étonnera donc pas de rencontrer des
goombas, des tortues volantes ou des frères marteaux. Mais Square
a su incorporer des créatures étranges, en nombre suffisant pour
éviter d'avoir trop souvent à recourir aux changements de palette
(même si le jeu n'est pas exempt de cela) mais qui impressionnent. D'une
part, la majorité ne feront ici qu'une seule et unique apparition, et ne
seront plus jamais revues ailleurs à ma connaissance ; d'autre part,
je trouve leur design plutôt... malsain. Je ne sais pas si c'est
le rendu « plastique » dont je parlais plus tôt, ou
ma sensibilité qui se fait des idées, mais j'ai toujours trouvé
les ennemis « inventés » pour l'occasion très
perturbants.
On ne peut arguer en revanche qu'ils sont nombreux et divers, et chacun possède son point faible et sa force. Les uns sont des brutes, les autres utilisent la magie. Il y a même des boss cachés, souvent même plus solides que le boss de fin, qui demandent une patience angélique pour pouvoir les surmonter. Globalement pourtant, et si l'on écarte ces challenges finalement anecdotiques (car la victoire nous procure un objet... inutile, puisqu'on est à présent capable de surmonter toutes les épreuves du jeu), on ne sera jamais parfaitement inquiété, et l'on jouera toujours de façon tranquille, à condition bien sûr de ne pas être, comme moi, décontenancé par la « bizarrerie » de certains de ces monstres. Plus facile à dire qu'à faire
Deux éléments, selon moi, participent grandement à ce caractère
paisible. Le premier, c'est le fait que l'on distingue les ennemis dans l'aire
de jeu, ce qui nous affranchit de ces stressantes rencontres aléatoires.
Oh ! Les développeurs ne se sont pas gênés pour jouer
de ce travers, notamment en faisant surgir du néant des ennemis dès
que l'on passe à un certain endroit, ou en accélérant leur
mouvement à notre approche ; mais globalement, libre à chacun
de sauter par-dessus les adversaires, même si, mais c'est là un poncif
du genre, certaines rencontres sont inévitables.
Est-ce pour autant que le jeu est facile ? Oui et non, dirais-je. Si on lit
un peu partout que le jeu est « facile », il faut pourtant
moduler un peu ce premier sentiment. Moi-même, qui pourtant ai fait nombre
de RPGs réputés plus compliqués que celui-ci, je n'ai pas
su éviter plusieurs fois de honteux game over. Ce n'est pas parce
que l'enrobage est sucré que le bonbon n'est pas acidulé pour autant ;
et même les routiers seront surpris de certains boss retors ou de zones
labyrinthiques qui nous font craindre pour notre intégrité. Super
Mario RPG est un jeu à prendre au sérieux : les dégâts
occasionnés et reçus se chiffrent à la fin du jeu par centaines,
et les points de vie des adversaires en milliers ; on peut être endormi,
incapable d'utiliser la magie ou changé en champignon ; et certains
coups, s'ils portent, sont même mortels.
Pour résumer, l'on peut dire que Super Mario RPG est à la fois facile et difficile Je sais que cela peut être étrange et même impossible, mais c'est là mon grand sentiment. Il est facile dans la mesure où l'on sait toujours que faire et où aller, et que l'on peut aisément éviter tous les ennemis, si ce n'est les rencontres inévitables ; difficile car ponctuellement surgit un boss incroyablement compliqué, ou un donjon d'une longueur démentielle, ou un simple ennemi qui possède une résistance hors normes. Le jeu n'a donc rien d'une parfaite promenade de santé ; mais il ménage suffisamment le joueur pour l'inviter à poursuivre et à se dire que, finalement, sa mort dernière n'était qu'un accident de parcours dû à un manque d'attention. L'influence de Super Mario RPG
Celles et ceux qui connaissent Paper Mario ou Superstar Saga seront
surpris de voir que Super Mario RPG a introduit énormément
d'éléments repris encore aujourd'hui et que l'on ne retrouve quasiment
presque pas ailleurs. Les « commandes action », l'utilisation
d'armes comme le marteau pour Mario, le fait que Bowser et le plombier fassent
équipe, le fait que tous les goombas, boos ou koopas ne soient pas foncièrement
mauvais et servent parfois d'adjuvants, l'humour omniprésent et volontiers
potache, etc. se retrouvent encore dans les derniers jeux. Il est impossible de
ne pas voir en cela le rôle précurseur que ce titre a joué
pour cette série qui a connu une belle renommée.
Super Mario RPG est un jeu exceptionnel, je le crois sincèrement. Il n'a pas la prétention de marcher aux côtés de Chrono Trigger ou de Final Fantasy ; mais il a trouvé sa propre voie, qui sera sans cesse améliorée par la suite. Et n'est-ce pas là le signe de qualités indéniables, que d'avoir servi de modèle à ses disciples ? Un avis sur l'article ? Une expérience à partager ? Cliquez ici pour réagir sur le forum (17 réactions) |