Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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Par JPB (11 mars 2019) Le shoot'em up est le genre qui a certainement le plus été décliné en arcade. Sans essayer de les lister chronologiquement, on aura connu les jeux avec orientation verticale (Moon Cresta, Galaga...), horizontale (Scramble, R-Type...), circulaire (Tempest, Gyruss), libre (Asteroids, Mad Planets...) ou 3D (Buck Rogers, Subroc...). Sans compter un nombre inconvenant de bootlegs à rajouter (ces clones faits sans autorisation par d'autres sociétés, comme Vautour de Jeutel qui est un des bootlegs de Phoenix). Bref, si on commence à les compter, on n'a pas fini. Tout ça pour dire que de temps en temps, un jeu sort du lot de l'époque, en proposant une idée novatrice, des graphismes plus élaborés, une musique en stéréo ou des contrôles encore jamais vus - voire un mélange de tout ça. C'est ainsi qu'en 1982 est sorti Xevious, qui a largement contribué à l'évolution du monde des shoot'em up. Un monde étrangeQuel est le scénario de Xevious ? Et d'abord, de façon plus générale, "le scénario est-il réellement important dans un shoot'em up ?" Vous avez 2 heures.
Rien de bien nouveau en somme. Je pense que vous serez d'accord avec moi : comme dans la plupart des shoot'em up, le scénario de Xevious n'a pas d'importance pour jouer. Pourtant, il y a eu un gros travail de recherche pour créer l'histoire et les noms de ce peuple... Apprenez que Masanobu Endou a écrit un roman, sorti peu après le jeu d'arcade, pour en développer le scénario. Au vu du succès rencontré par Xevious (surtout au Japon où il est quasiment culte), cela mérite d'être mentionné. Solvalou y es-tu ?La toute première chose qui frappe, quand on commence une partie de Xevious, c'est qu'on n'est pas dans l'espace. Comme c'est un shoot'em up vertical, on se retrouve en vue plongeante sur des décors composés de forêts, plaines, chemins, cours d'eau... Voilà qui est fort agréable et change des habituels ciels noirs, piquetés d'étoiles plus ou moins colorées. D'après le scénario, on est même sur notre bonne vieille Terre - d'ailleurs on survole à un moment précis un élément reconnaissable entre mille, qui figure parmi les souvenirs mémorables pour qui a réussi à survivre suffisamment longtemps à Xevious. Mais j'y reviendrai dans la partie technique. Le deuxième élément marquant, lié à cette vue plongeante, c'est qu'on peut tirer en face du vaisseau mais aussi vers le sol. On avait déjà vu ça dans Cosmic Avenger ou Scramble, mais ce sont des shoot'em up horizontaux, où l'on voit l'action de côté. Xevious est le premier shoot'em up vertical à proposer ce challenge : comme l'action est vue du dessus, on a systématiquement à l'avant du Solvalou une mire qui permet de savoir où tomberont les bombes larguées. On retrouvera ce principe dans par exemple Legendary Wings, ou dans Dragon Spirit (qui, lui, ne propose pas de mire pour savoir où exploseront les bombes). La troisième chose qui surprend, même si ça saute moins aux yeux, c'est que le vaisseau a un nom ! En effet, le jeu annonce combien de vaisseaux il reste au joueur, et pas simplement par un petit dessin dans un coin de l'écran : par la phrase "x Solvalou left" ("x Solvalou restants"). Solvalou ? Étrange nom pour un vaisseau spatial, mais après tout, pourquoi pas ? Deux niveaux de jeuExcellente transition pour parler des ennemis. Du fait qu'il est possible de tirer soit en face du vaisseau, soit vers le sol, il est logique qu'on se trouve confronté à des cibles aériennes et terrestres. Voici les plus représentatives, grossies deux fois pour que vous puissiez les examiner à loisir : Unités terrestres
Unités aériennes
Si les premiers ennemis rencontrés ne sont pas bien dangereux, rassurez-vous : ça ne va pas durer. Au début, vous ne risquez pratiquement rien : les Toroid ne vous tirent pas dessus et changent leur trajectoire pour ne pas vous toucher, à part un ou deux qui n'ont pas bien compris. Petit à petit, vous allez survoler les premiers bâtiments, des Bara, Logram ou Zolbak pacifiques également, puis affronter les premiers ennemis vindicatifs (Torkan et Toroid)... Et en à peine plus de temps qu'il n'en faut à Actarus pour descendre de sa soucoupe jusque dans la tête de Goldorak, vous allez devoir louvoyer entre les unités aériennes, les tirs des bâtiments et des vaisseaux, sans oublier de tirer quand même sur vos adversaires. Après quelques minutes de vol, vous découvrez les vaisseaux qui sont à mon avis les plus représentatifs de Xevious : les fameuses plaques indestructibles qui tournoient lentement dans l'air, appelées Bacura. Qui n'a pas essayé - en vain - d'en détruire au moins une ? Le bruit des tirs qui font mouche mais n'altèrent en rien la trajectoire inexorable des plaques est lui aussi inoubliable. Ce court passage est un grand moment de l'histoire des shoot'em up. En continuant d'avancer, vous entendez soudain un bourdonnement grave, et êtes attaqué par des Zakato et des tirs ennemis : c'est le prélude à l'apparition de la forteresse volante Andor Genesis, le vaisseau-mère commandé par le Bragza, qui surgit quelques secondes plus tard pour vous détruire. Vous pouvez l'affaiblir en tirant des bombes sur les quatre canons (ce qui est fort appréciable pour ne pas être submergé par ses tirs), mais le seul moyen de le détruire est d'arriver à lancer une bombe pile au centre, comme dans l'Étoile Noire de Star Wars. Si vous y arrivez, le Bragza, indesctructible, s'enfuit jusqu'à prendre les commandes d'un autre Andor Genesis que vous affronterez plus loin. Unités aériennes
En attendant cette prochaine rencontre, vous continuez votre route et le combat, en survolant d'abord le mastodonte abattu. Plus vous vous accrochez, plus les ennemis deviennent nombreux et belliqueux. Peut-être arriverez-vous à dénicher les unités cachées, les fameuses Sol Citadels qu'on ne peut trouver qu'en surveillant l'extrémité de la mire qui les détecte, et en les bombardant pour les faire sortir du sol ? Trouverez-vous les drapeaux vraiment cachés, eux, et qui vous donneront chacun une vie supplémentaire ? Vous voyez, vous n'allez pas vous ennuyer ! Vous trouverez des infos supplémentaires sur les unités présentes dans la saga Xevious sur cette page. Un peu de techniqueXevious utilise trois Z80 et un MB88xx. Les bruitages utilisent un circuit Discrete, et la musique est gérée par un WSG à 3 canaux de Namco. Ce jeu n'est pas le tout premier shoot'em'up à proposer un scrolling vertical, mais c'est le premier à proposer des graphismes pré-calculés aussi détaillés. Les sprites sont très fins et proposent plusieurs coloris en fonction des reflets métalliques des engins ou bâtiments. Les décors sont colorés, et assez variés. En fait, l'ensemble du terrain de jeu est un immense dessin de 1024 x 2048 pixels, que vous pouvez voir ici : chacune des 16 zones du jeu est une bande de 224 x 2048 décalée horizontalement des autres, qui commence toujours par la forêt en bas de l'image ; l'écran ne représente qu'une zone de 224 x 288 pixels qui se déplace verticalement sur cette bande. Si vous finissez la 16ème zone, vous recommencez depuis la 7ème, et ainsi de suite. Donc chaque fois que vous survolez une forêt qui fait toute la largeur de l'écran, vous passez à la zone suivante. Petit détail sympa : quelque part sur l'ensemble du décor, les programmeurs ont dessiné un oiseau, qui ressemble aux géoglyphes du plateau de Nazca, précisément au colibri. Effet garanti ! Parlons de l'animation. Les ennemis se déplacent plus ou moins rapidement à l'écran, là aussi de façon fluide. Certains sprites peuvent avoir une petite animation propre, comme les Toroids ou les Jaras qui tournoient sur eux-mêmes. Pour les autres, leur animation reste simple et cohérente, surtout quand il y a un petit bonus pour certaines unités aériennes qui lorsqu'elles s'enfuient, font un looping et se retournent : le mouvement dessiné est harmonieux. Les bruitages sont tout à fait dans la norme de l'époque : les tirs et explosions sont bien représentés, mention spéciale comme je le disais plus haut au bruit des tirs arrêtés par les Bacura indestructibles. Pour ce qui est de la musique, il y a deux éléments à dissocier : les trois jingles et la musique en cours de jeu (appelée background music, ou BGM). Autre innovation de Xevious : il s'adapte au joueur. Plus vous êtes efficace, plus le jeu vous oppose des adversaires coriaces. Vous le verrez facilement : il suffit de rater toutes vos cibles lors du démarrage d'une première partie, et lors d'une deuxième partie d'atomiser tous les Toroids qui vous font face. Vous constaterez lors de ce deuxième essai que les premiers tirs ennemis arriveront plus rapidement, que le nombre d'ennemis augmentera, voire que de nouveaux adversaires plus retors feront leur apparition... C'est un des arguments du flyer : l'apparition et les déplacements des ennemis seront différents d'une partie à l'autre. La suite ?Je ne parlerai pas des innombrables conversions, tant sur les machines de l'époque que dans des compilations réalisées plus tard (la dernière version de Xevious est Xevious Resurrection, sorti en 2010 dans la compilation Namco Museum Essentials sur PS3)... On s'éparpillerait trop. Je préfère rester dans le domaine de l'arcade pure car Xevious, en plus d'avoir apporté tous ces éléments novateurs dont j'ai parlé jusqu'ici, a également été le premier volet d'une série. Jeu dérivé de Xevious, on trouve Grobda (1984) qui permet de contrôler un des ennemis du Solvalou (voir plus haut, dans la liste des unités terrestres). On y dirige un tank qui doit détruire tous les tanks adverses. Super Xevious (1984) est une version un peu plus difficile de Xevious pour l'Italie où la partie coûtait un peu moins cher. Quelques unités ont été ajoutées et les objets cachés ont été déplacés. Il paraît que la différence la plus marquante est qu'ils ont redessiné les ponts sur les cours d'eau, ponts qui avaient été oubliés lors de la version finale de Xevious... Mais j'ai fait quelques parties et je n'ai pas vu de différence visuelle avec l'original - en tout cas, sur mes parcours, je n'ai pas vu de ponts ! Vs.Super Xevious (1986) est une conversion de Xevious provenant de la version NES, pour la borne d'arcade de Nintendo. Solvalou (1991) est la première "vraie" suite, en 3D pleine. C'est un rail shooter en vue subjective dans lequel on cible des ennemis provenant de l'univers de Xevious. Xevious 3D/G (1995) propose une nouvelle version de Xevious, en 3D toujours, mais cette fois on voit de nouveau le vaisseau à l'écran. On peut y jouer à deux en même temps. Namco Classic Collection vol.1 (1995) permet de rejouer en arcade à Xevious, mais surtout à sa version améliorée : Xevious Arrangement. Décor affiné, sprites légèrement redessinés, animation plus rapide et plus fluide... On ne révolutionne rien, mais on sent tout de suite la différence, sachant que la difficulté a été un peu revue à la hausse. Restent les deux points les plus importants : 1/ on peut y jouer à deux en même temps et 2/ un nouveau thème musical remplace l'ancien, un vrai bonheur ! Le succès de Xevious (encore une fois, principalement au Japon où il est considéré comme un des plus grands jeux vidéo de tous les temps) ne se dément pas puisqu'on a vu de nombreux clins d'œil dans d'autres jeux de Namco, principalement certaines versions de Ridge Racer, mais aussi dans d'autres jeux comme Earthbound sur SNES ou Super Smash Bros sur 3DS... D'ailleurs, le Solvalou est l'avatar que j'ai choisi sur le PSN ! :) ConclusionJ'ai découvert Xevious en 1984, à Cannes. Je prenais mon vélo et j'allais jouer dans un bistrot pas trop loin de chez moi, le seul dans mon souvenir où j'allais à cette époque. On y trouvait Xevious et Bomb Jack côte à côte, et je n'ai pas accroché à Bomb Jack... J'ai fait pas mal de parties à Xevious, mais je ne suis jamais allé bien loin. Ça ne m'empêchait pas de revenir tenter ma chance, car ce jeu a un charme indéfinissable malgré sa musique prise de tête : même s'il a été dépassé techniquement depuis, Xevious reste un excellent shoot'em up, avec une difficulté qui augmente régulièrement et qui prend en compte les performances du joueur. Un avis sur l'article ? Une expérience à partager ? Cliquez ici pour réagir sur le forum (4 réactions) |