Actualité de l'émulation [contenu fourni par Emu-France]
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Par MTF (25 mars 2013)
Beaucoup de joueurs pensent que Capcom a inventé le genre, qui a connu une fort belle renommée, du survival-horror avec Resident Evil. En réalité, tout ce qu'a pu inventer Capcom, c'est le terme même, à l'attrait publicitaire indéniable ; le genre en lui-même existait en réalité bien avant qu'on ne puisse le nommer, jusqu'alors ce n'était que des « jeux d'aventure », avec tout le flou qu'une telle dénomination suppose, ayant une composante horrifique plus ou moins prononcée. Il serait cependant pour le moins audacieux et naïf de ma part que de proposer un panorama du genre de « l'horreur » dans le jeu vidéo, car celui-ci, en réalité, a toujours été plus ou moins présent : je me souviens qu'étant petit, la musique des châteaux de Super Mario Bros. et leur décor entièrement noir me terrifiaient, sans même parler de l'ambiance des temples d'un The Legend of Zelda ou d'un Castlevania qui me mettait tout en émoi. Bonjour, Jennifer...En septembre 1995 (date correspondant à la sortie du jeu, on appréciera ici la volonté de briser les frontières du monde virtuel), dans la sublime campagne norvégienne, 4 orphelins sont adoptés par un riche couple, les Barrows qui vivent, reclus, dans un gigantesque manoir que surplombe un clocher menaçant qui a donné son nom au domaine, The Clock Tower. Notre histoire commence tandis que Mary, l'épouse de Mr. Barrows, ayant ramené les enfants au logis, les laisse un instant dans le grand hall le temps de chercher son mari. Au bout de quelques minutes cependant, trouvant le temps long, les enfants s'inquiètent de ce silence assourdissant. Jennifer, sans doute la plus dégourdie du groupe, se décide de partir à sa recherche sans savoir que ce qu'elle trouvera ne lui plaira pas forcément... C'est à ce moment-là que le joueur prend la main. Dirigeant un curseur à la croix directionnelle et interagissant avec son environnement au moyen des boutons, les premières secondes sont à la fois très particulières, et très déstabilisantes. Particulières, car la forme point'n click n'a été
que très peu représentée sur console, et encore
moins pour un jeu d'aventure : si l'on trouve certes des adaptations
de célèbres simulations, telles Sim
City, ou quelques jeux éducatifs, la forme ne s'est
que guère imposée sur nos consoles, et cela est compréhensible,
quelque part, puisque diriger un curseur est plus intuitif avec une
souris qu'avec un pad. Déstabilisantes, car tout ce qu'on demande à Jennifer de faire est d'une lenteur volontiers exacerbée qui rend mal à l'aise. Nous avons l'habitude dans nos jeux vidéo d'être porté par la vitesse, par l'agilité, par les réflexes. Et pourtant ici, lorsque nous pointons un endroit quelconque de ce grand hall, Jennifer s'y rend lentement, et chacun de ses pas résonne sur le parquet vernis comme un glas. Ça va couper chéri !Après cette première introduction historique, j'aimerais revenir sur le gameplay du jeu en lui-même. Comme je l'ai indiqué à l'instant, Clock Tower se présente selon une interface point'n click, c'est-à-dire que le joueur ne contrôle pas directement les faits et gestes de Jennifer mais « pointe » un endroit particulier du décor avec lequel elle va pouvoir interagir. S'il s'agit d'un endroit du sol, Jennifer va pouvoir s'y rendre, s'il s'agit d'un objet quelconque, elle va pouvoir soit l'observer, soit l'activer s'il s'agit d'un mécanisme, soit le prendre s'il s'agit d'un objet. Le jeu gère un inventaire d'une petite dizaine d'éléments - il n'y en aura guère plus à collecter - et, bien entendu, il sera possible de les utiliser sur d'autres parties du décor et d'autres objets pour résoudre des énigmes et avancer dans l'aventure. Le jeu se déroulera alors au sein de ce gigantesque manoir, composé d'un rez-de-chaussée, d'un étage et d'autres petits éléments adjacents. S'il est possible de faire une carte relativement précise des environnements, il faut savoir que bien que certaines pièces se trouvent toujours au même endroit, d'autres, généralement cruciales pour finir le jeu, peuvent avoir deux ou trois positions, définies aléatoirement au lancement de la partie. On trouve alors des salons, des salles de bain, des hangars, des chambres diverses, toutes ayant leur propre cachet et leur propre « code couleur » qui permettent de les repérer assez rapidement. Il reste cependant qu'il n'y a aucune carte in-game, si bien qu'il vous faudra faire fonctionner votre mémoire pour éviter de tourner en rond. Et il n'est jamais bon de tourner en rond dans Clock Tower. Le joueur, Jennifer, a trois objectifs principaux :
Si les deux premiers « objectifs » vous sont délivrés par la conduite de l'histoire, je reviendrai alors à cela ultérieurement, le troisième, en revanche, est plus ou moins aléatoire bien que dicté en partie par vos actions. Dès votre première rencontre avec Scissorman, celui-ci, en effet, se mettra en chasse de chair fraîche, votre chair fraîche. Mais il ne se contentera pas de vous suivre comme un toutou dans la pièce ou le couloir où vous vous trouvez et oublier votre présence dès que vous passez une porte. Au contraire, il vous suivra où que vous alliez, passant par les mêmes portes voire vous tendra des embuscades : quand vous entrez dans une pièce, vous ne saurez jamais si Scissorman n'est pas là à vous attendre, caché dans une caisse en bois ou derrière un rideau, prompt à vous hacher menu ; et si vous avez la présence d'esprit de vous cacher, il n'est pas dit que le tueur en série ne trouvera pas un moyen de vous débusquer au moment où vous vous y attendez le moins. Votre
capacité à survivre à certaines rencontres avec
Scissorman, car il y a fort à parier que vous le rencontrerez
de temps à autres, et à certains dangers, sera conditionnée
par la petite icône située en bas à gauche de
l'écran avec le portrait de Jennifer qui a un fonctionnement
similaire, sur certains aspects, à l'icône présente
dans I have no mouth and I must scream.
Il représente en effet « l'état d'anxiété »
de Jennifer, qui connaît quatre niveaux : bleu - je
vais bien, tout va bien -, jaune - je vais bien mais pas
trop -, orange - je vais pas trop bien mais je gère
-, rouge - oh mon Dieu je vais mourir. La fin justifie les moyensCes rencontres participent grandement à l'état d'inquiétude que l'on peut ressentir en jouant à Clock Tower, puisque deux parties ne seront jamais parfaitement identiques : Scissorman n'apparaît jamais deux fois de suite au même endroit et une salle auparavant sûre peut ne plus le devenir une fois suivante. Et après cela, le jeu continue de surprendre le joueur en proposant non pas une ou deux, mais bien 9 fins différentes, notées de A à H (plus on se rapproche de A, plus l'issue sera heureuse) et une fin S (pour Special) qui est une variation intéressante de la fin A. Dans la plupart des cas, les associations d'objet sont relativement nettes, le plus grand danger ne venant jamais que de votre capacité à éviter le Scissorman et les autres périls qui vous attendent au tournant ; et dans d'autres situations, le fait de ne pas avoir collecté un objet en particulier vous conduira nécessairement à la mort. Il faut noter ici qu'autant certaines « fins »
prévues par le jeu se terminent par un sort funeste pour Jennifer,
autant la majorité de vos morts, dans le cours de l'aventure,
s'achèvera par un Game Over et la nécessité
de reprendre votre sauvegarde. The fear continues...Clock
Tower, réservé lors de sa sortie au Japon uniquement
y compris lors de ses rééditions successives sur Playstation,
Windows ou Wonderswan, a été redécouvert
par l'intermédiaire de ses suites qui ont été,
quant à elles, localisées même si cela s'est fait
de façon irrégulière (Clock Tower 2 a
été rebaptisé Clock Tower aux États-Unis
et en Europe, sa suite Clock Tower 3 est inconnue en Europe,
etc.). Des traducteurs amateurs ont alors pris le parti de proposer
une adaptation anglaise de ce chef d'œuvre, traduction on ne
peut plus juste et élégante : je ne vois pas comment
la chose aurait pu être mieux réalisée. N'ayant pas fait les suites en détail, je ne saurai que les évoquer en passant : à ce que j'ai pu voir cependant, il m'a semblé qu'ils se sont rapprochés des Resident Evil ou des Dino Crisis, avec des environnements volontairement plus dérangeants et plus effrayants, et les antagonistes, de même, se rapprochent de grosses bestioles effrayantes et n'ont plus ce sentiment inquiétant et étrange (ou d'Unheimlich, si vous êtes freudien) que pouvait avoir le nabot original. De là, Clock Tower resterait, et ce malgré ses nombreuses suites, un essai unique pour Human Entertainment. Son approche d'une horreur plus psychologique qu'effrayante, qui a su trouver un écho ultérieurement dans la série des Silent Hill, entre autres, en fait cependant une œuvre historique et unique qui se doit d'être redécouverte par tous les joueurs s'intéressant de près ou de loin au genre du survival-horror et à son histoire. Sources, remerciements, liens supplémentaires : L'excellent site 1up-games.com a fait un test fort complet de ce jeu à cette page. Je recommande notamment la lecture de sa première annexe sur les influences filmiques des développeurs, puisqu'ils auraient fortement puisé dans l'œuvre du réalisateur italien Dario Argento (Phenomena, Tenebræ, Inferno...). sanjuro, créateur et auteur du site, fait une série de comparaisons très intéressantes entre ces longs-métrages et les scènes et protagonistes du jeu. Je n'ai pas voulu aborder ces aspects dans l'article car ne connaissant que de très loin le travail de cet artiste de renom, et que je voulais vous faire découvrir ce site exceptionnel que je parcours avec grand plaisir pour la qualité de ses réflexions.
Soyez avertis cependant, les annexes de 1up-games révèlent des moments cruciaux de l'intrigue du jeu. N'y allez qu'une fois le jeu terminé ou si vous êtes assuré de ne pas vouloir le découvrir de vous-même. Un avis sur l'article ? Une expérience à partager ? Cliquez ici pour réagir sur le forum (12 réactions) |