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Destruction Derby
Année : 1996
Système : N64, Windows, Playstation, Saturn
Développeur : Reflections
Éditeur : Psygnosis
Genre : Jeu de Course
Par Gregoss (11 décembre 2003)

In da startin’ blockz...

Le « Derby de la Destruction »... Ah, quel nom magnifique ! Quel titre, qui fleure bon la gomme de pneu laminant l’herbe des champs, tel un pur moment de poésie ronronnante comme un moteur seize soupapes et dont les vers finiraient tous par Brrrroooommmm, Brrrroooommmm... Quelle évocation de mon passé de gamer entré en âge de raison en même temps que dans un magasin afin de m’acheter la dernière console de Sony, la Playstation, la Psx, la « Playstèche », le rectangle gris, la petite boîte issu de la grosse boite... Quelle époque... On y va, on en parle, et que les moteurs vrombissent ! Un... deux...trr... Ah, non, non, non pas encore... Je me souviens de ce jeu qui était fait pour les joyeux bourrins, les amoureux des champs de course et de batailles, les adorateurs des bagnoles tagées d’aigles et d’icônes iron-maideniennes, mais avant tout pour les fans du vidéoludisme, les goûteurs de jeux qui ont marqués une machine au fer rouge...

Avant les starting blocks, rendons-nous aux dicos ! Destruction, tout d’abord. Ah, la destruction ! Voilà le lot des gamers. Ça, on connaît : que se soit dans les labyrinthes de la forteresse ennemie, les marais d’une obscure planète, les coursives pourries d’un vaisseau spatial, les atmosphères exotiques des shoot them up ou des Doom-like, sur les prairies quadrillées d’un wargame ou dans les forêts profondément moites d’un RPG, et même jusque dans la jungle vietnamienne recréée à l’occasion d’une simulation de guerre en gerborama, on en a bavé, on en a explosé des ennemis, on en a fait péter des structures vectorielles. Et cette destruction de masse crépite tout autour de nous... Enfin bon, quel boulot, on est crevé quoi...

C’est le mot Derby qui est un peu plus dur à définir. Après une fatiguante investigation, je découvre que ce mot vient de la course de chevaux d’Epsom se déroulant dans le doux pays de sa majesté Elizabeth number two ; ce faisant, le nom propre lié à cette chère manifestation a certainement contaminé le langage courant pour caractériser un sport qui, selon le dictionnaire francophone en ligne, est « une rencontre opposant deux équipes sportives d’une même ville ou de deux villes voisines ». De ce point de vue, un match de foot entre l'Inter de Milan et le Milan AC est un derby, mais le Derby de la Destruction n’est pas un jeu en équipe, loin de là. Sur le bitume, vous êtes seul. Non dans le noir, mais bien au soleil des différents circuits infernaux que vous allez traverser tels les parcours du combattant de la mécanique automobile. Alors si derby il y a, la course à laquelle on assistera en cette année 1996 sera quelque peu différente d’une bête course de chevaux... 1996 fut une année durant laquelle beaucoup commençaient déjà à voir juter les stock options de la net-économie naissante. Les gamers eux, se consacraient plutôt à la destruction jouissive des stock-cars de la game-économie...

Bon, allons-y... Un... deux... trois, paar... Non, non, encore une chose au moins : Psygnosis ! Comment ne pas revenir sur cet incroyable éditeur qui a aidé à forger l’âge d’or de l’Amiga pour plus tard créer Destruction Derby ? Cultissime. Dans le joyeux désordre, des softs comme la série des Shadow of the Beast, Awesome, Lemmings, Agony pour ne citer qu’eux vont constituer des pierres précieuses et angulaires de la ludothèque de la machine de Commodore (bon... n’oublions pas par pure justice l’Atari ST sur laquelle Psygnosis a aussi fait des merveilles). Si le brillant Agony était le fait des français de Art and Magic, le hit mythique de 1989 qu’est Shadow of the Beast est le fait d’un développeur de Newcastle au sobre nom de Reflections. Reflections travaillera ensuite pour un autre éditeur, GT Interactive et continuera à signer les pages du livre d’or de la Playstation grâce à des titres comme Driver et, sous l’égide de la boîte à la tête de chouette, Destruction Derby (DD) qui, pour ses premiers pas dans l’ère 32-bits, effectuait là une entrée remarquée... Depuis cette époque (huit ans déjà), Psygnosis semble n’avoir plus rien en commun avec ce qu’on a connu lors de la période Amiga. À ce qu’il semble, la vaillante boite british se serait faite quelque peu engloutir par le géant nippon Sony au début de l’ère Playstation. Il suffit aujourd’hui de taper http://www.psygnosis.com et atterrir sur le site Playstation pour s’en convaincre. À l’instar d’Atari, pauvre nom décharné investi par Infogrammes comme un alien investit le corps d’un pote d’Ellen Ripley, il semble que l’époque contemporaine du jeu vidéo doive nous habituer à ce genre de regrettables appétits...

Réminiscences amigaiennes...

Afin de ne pas commencer sur les chapeaux de roue sans prévenir, comme ça, le présent article ne parlera que de la version PS1 de Destruction Derby, et ne fera qu’un léger compte-rendu de toutes les versions de ce hit sorti sur bon nombre de machines... Bon, on peut y aller maintenant ? Pas encore ? Non ? Bon, alors puisqu’il faut encore ronger son frein avant la course et se perdre dans quelques précisions nécessaires, regardons de plus près l’apparence graphique des menus pour se rendre compte qu’il y a comme un air de déjà-vu...

Reflections, en effet, semble avoir eu du mal à se défaire de quelques habitudes esthétiques et peut-être que l’époque Amiga les aura suffisamment marqués pour qu’ils en soient sortis graphiquement troublés, et mêmes heurtés. Ça tombe bien puisque des heurts, il y en a dans ce jeu mais le premier choc est pour le joueur : la réminiscence graphique (« Tiens, on se croirait un peu sur Amiga ») a entraîné chez moi une joie mêlée de suspicion ; même si on est bien sur la mythique console de Sony, les premiers écrans annonçant l’éditeur et le concepteur du jeu ressemblent trait pour trait aux écrans de la machine de Commodore : dégradés fins de plusieurs dizaines de teintes de couleurs froides aux dominantes blanches et azurées, aspect très métallique... Franchement, pour un peu, on croirait avoir ressorti les bonne vieilles disquettes bleues du placard !

Destruction Derby est d’ailleurs l’une des premières incursions de Psygnosis sur la plate-forme Sony... Psygnosis sur PS1 ça sera une histoire en dent de scie avec des Wipe Out historiques mais inégaux et les décevants Lemmings 3D et Metal Conflict... Ceci est un autre débat qui n’empêche pas d’affirmer que comme pour l'Amiga, Psygnosis a contribué à bâtir la réputation de la « Playstèche » grâce à des softs accrocheurs, solides et historiques (et aussi grâce à la création d’un kit de développement PSX pour PC qui aura permis d’en vulgariser l’utilisation chez bon nombre de développeurs... voir l’article sur la Playstation). DD fait selon moi partie de ce genre de jeux dont l’aura dans le monde du jeu vidéo est toujours palpable.

À la conception du jeu, on retrouve Martin Edmondson, game designer en chef de l’équipe Reflections, qui a débuté sur Acorn BBC. Vous pouvez profiter des fruits de son travail sur des jeux comme Driver 3 sur PS2.

Grand amateur de jeux de conduite, il a su bien s’entourer à l’époque puisque la programmation est signée Mike & Robert Troughton, deux frères qui semblent aussi apprécier de plancher sur ce type de jeu : ils travaillent désormais pour PitBull Syndicate qui, sous l’égide d’Infogrammes, s'est illustré avec Test Drive 4. PitBull syndicate est aussi à l’origine de l’autre grande référence de jeux de stock-car : Demolition Racer.

Un autre programmeur de DD, Russ Lazzari, a contribué quant à lui à Destruction Derby 2 et aussi à Stunt Man, la célèbre simulation de cascade. Les graphismes et textures de DD ont été pris en charge par Phil Baxter (il va ensuite aussi s’occuper de DD2). La musique est signée Tim Swan qui a pour l’occasion réalisé les effets sonores avec l’aide d’une vraie association organisant des courses de stock-car aux States, le Macdonald Racing.

Tim Swan est un personnage intéressant : programmeur travaillant dans l’industrie vidéoludique depuis 1991, date à laquelle Digital Developments lui demande de réécrire la musique de Shadow Of the Beast de David Whittaker pour la version Atari Lynx, il programmera le second opus du même jeu pour le Mega CD de Sega et la version Megadrive de Lemmings 2. Cela ne l’empêche pas d’être aussi doué dans la composition de bandes-sons pour jeux : ses talents de musicien et de programmeur combinés seront utilisés pour des jeux comme RIOT sur PS1 ou Rollcage Stage 2, un autre jeu de course délirant. Bien qu’ayant travaillé principalement pour Reflections, Tim Swan n’a que rarement été en contact avec cette équipe, lui même étant plus proche de Attention To Detail, un autre développeur travaillant pour Psygnosis. C’est avec eux qu’il programmera Rollcage et aussi Lego Racer 2. Il fait aujourd’hui partie d’Electronic Arts.

Buckle Up... and Sit Tight !

Bouclez vos ceintures et enfoncez vous dans votre siège-baquet ! (c’est en tout cas ma traduction de cette phrase qui s’inscrit à l’écran avant chaque course...). Ce qu’il faut encore savoir de Destruction Derby sur Playstation c’est que ce jeu est la première version console d’une franchise de simulation de stock-car acquise par Psygnosis. La première mouture du jeu était d’ailleurs censée reprendre les noms célèbres et autres circuits existants dans le véritable monde de stock-car. Reflections fera marche arrière (hem !), on ne sait trop pourquoi, pour offrir au joueur un jeu dont l’univers s’oriente de par son apparence vers une parodie béate et cool de l’univers des cinglés des autos-tamponeuses grandeur nature. Tout, en effet, est décalé, jusque dans la documentation qui ne peut pas s’empêcher de nous servir des phrases telles que « de nos jours la plupart des villes des pays du monde disposent de circuits de stock-car et celles qui n’en n’ont pas, comme Athènes et Rome, y remédient en permettant aux autochtones d’utiliser le réseau routier public ». C’est élégamment dit... Bon, maintenant on peut y aller ? On peut enfin se jeter à pneus perdus sur le goudron chauffant au soleil de l’enfer ? Oui ? C’est partiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii !

Dès que l’on commence à jouer, on ne peut que se dire que ça bouge vraiment pas mal. Les voitures, tout d’abord, sont modélisées très correctement. Leur aspect de bolides que l’on peut casser sans vergogne façon « Hot Wheels » est d’ailleurs très sympathique ; leurs formes font très cubes mais les emboutir reste un plaisir, même quelques années plus tard. Les décors eux, sont franchement laids et les couleurs parfois assez ternes voire mal choisies. Le moteur 3D aux textures énôôôrmes est véritablement d’un autre âge, mais offre la rapidité que l’on est en droit d’attendre de la part d’une course de bagnoles. Satisfaisant donc, mais à l’époque ce fut tout de même un sacré choc !

Commencer une course équivaut à ce qu’au début votre voiture en prenne plein le capot... Le jeu restera d’ailleurs réputé pour ses collisions mémorables et sans pitié. En gros, le but est d'éliminer vos adversaires à coup de pare-chocs. C’est une jungle sur route : il arrive bien souvent qu’on ne puisse effectuer une course jusqu’à la fin et dans le meilleur des cas, c’est sur un champ de bataille qu’il faut évoluer ; la confusion qui peut y prendre place est telle qu’elle en devient parfois jubilatoire, tout le monde se percutant sans relâche dans un véritable torrent qui vous emporte... Rappelons le quota attribué dans cette compétition hors-norme : 10 points pour un adversaire envoyé à la casse (de la fumée noire sort de son capot...), 2 points pour un 90°, 4 pour un 180° et 10 pour un 360°. À savoir que les points sont doublés s’il s’agit de la voiture en tête de la course.

En plein cœur de l’action, on remarquera que la gestion des collisions est quelque fois assez aléatoire (il peut arriver que l’on rentre quelques millimètres dans une voiture sans l’émécher le moins du monde) mais l’énervement suprême est de croire qu’un bon coup de paddle à droite ou à gauche derrière un concurrent va permettre de le faire diaboliquement chasser de l’arrière alors que la plupart du temps cette technique spontanée ne vous fait récolter qu’un magnifique plantage. C’est que Destruction Derby relève de tout un art et pour récolter des 360° vengeurs à tire-larigot, il faut être en mesure de faire tourner délicatement la voiture adverse comme une partenaire qu’on inviterait à tourbillonner dans une valse légère.

Les dégâts que subit votre engin sont aussi une des particularités amusantes du jeu : rien de plus fendard que de voir votre bolide se transformer peu à peu en boîte à sardine accordéonnée, le capot replié de façon presque boudeuse, les pneus arrière frottant contre la carlingue et les essieux déglingués... Cependant cela a une incidence directe sur la réactivité de votre voiture car au-delà d’un certains seuil, la direction ne sera plus utilisable et vous serez obligé d’enfoncer les tranches de la manette à donf pour pouvoir tourner. Si votre avant est touché, c’est plus grave car c’est le moteur le véritable talon d’Achille de chaque véhicule. Inutile de compter le nombre de course où l’on doit parcourir péniblement les quelques centaines de derniers mètres en marche arrière : un radiateur cassé en pleine course est par exemple une sacrée mauvaise nouvelle, généralement confirmée par la voix déchaînée et goguenarde du commentateur...

En fait pour pouvoir survivre dans ce jeu, il faut très tôt commencer à développer des stratégies et des réflexes de survie impitoyablement drastiques, conditionnés par ce que vous pouvez faire sur la piste et ce que vous ne pouvez pas faire... On ne pourra qu’être énervé par l’incapacité de la voiture qu’on a entre les mains d’atteindre très vite la vitesse maximum et ainsi de très mal tourner, ce qui a comme résultat immédiat de se taper les bords de pistes avec les ailes avant, et comme résultat second de nous conforter dans l’idée que DD n’est pas véritablement un jeu qui se base sur le plaisir de dominer et d’exceller dans la conduite de son bolide, ou en tout cas très peu... Il n’y a aucune dimension de simulation ici car ce pour quoi le jeu est fait, c’est la bestialité d’un conducteur lancé dans une aire où les règles sont prédéfinies certes, mais dont la finalité est de transformer des lacets de bitumes entier en décors de Mad Max. Ce genre de libération salvatrice et motorisée, la Playstation en connaîtra encore de nombreux aspects, pas tous dans la veine « stock-car ». Citons par exemple, et en hommage, le bon vieux Driver signé par la même équipe de concepteurs.

Another car on the wall...

Destruction Derby n’est pas un jeu où l’on s’amuse à vouloir atomiser les records et les temps. Il n’y a presque là aucun intérêt même si un mode de jeu Time Trial vous permet d’affronter un autre bolide dans une course de vitesse. Les autres modes proposés sont le Wreckin’ Racing qui vous lance dans une saison dont vous devrez sortir premier si vous voulez passer en division supérieure, le compte de vos points se faisant uniquement en fonction du nombre de dommages que vous aurez fait subir à vos 19 concurrents. Il y a cinq divisions en tout et finir premier de la division 1 n’est pas donné à tout le monde quand on joue en mode normal ou difficile (Amateur ou Pro). Le mode Stock Car Racing calcule quant à lui vos points en fonction de votre classement d’arrivée. Inutile de dire qu’avec le Time Trial c’est sans doute le mode de jeu le moins intéressant, puisque le fun de la destruction y prend moins d’importance... Snirf.

Il faut savoir que pour chacun de ces modes vous est offert le choix de vous exercer à une course, de commencer un championnat, de jouer en multi-joueurs (par ici la seconde Playstation, le jeu n’offre pas la possibilité de splitter l’écran en deux) ou de faire des parties en duel contre l’ordinateur ou contre un ami (toujours via une seconde console), tous les deux seuls sur les circuits.. Le mode Replay permet de revoir la course entière par le biais de plusieurs caméras ou d’une caméra unique ou encore d’une caméra surplombant la piste. Une option Direction permet de déplacer cette dernière. Enfin, une dernière option permet de disposer toutes sortes de caméras et de choisir ainsi vos propres angles de vue. Ce qu’on retiendra de ce mode Replay est qu’il fait modestement son office, mais sans plus : on pourra lui reprocher principalement d’être dépourvu d’une interface véritablement claire et intuitive...

Les niveaux de difficultés sont quant à eux au nombre de trois : Rookie, avec la voiture « Psygnosis », Amateur avec la noire « Grim Reaper », ou Pro avec la « Smoothie »... Que l’on soit clair tout de suite : la particularité des bagnoles Amateur ou Pro est que ces dernières sont plus fragiles, tournent moins bien, et semblent aller moins vite que le stock-car Rookie ! C’est vraiment bien la peine que je me fatigue sur mon siège pendant des heures de circuit pour écoper de telles catastrophes du bitûme, c’est comme si on remerciait Schumacher d’avoir gagné le championnat du monde en lui donnant à conduire un karting pour la prochaine saison ! Bon, ne soyons pas mauvais public puisque c’est vrai qu’au bout de quelques jours de jeu intensif, le mode Rookie atteint ses limites (la voiture est par exemple remise automatiquement dans la bonne direction dès qu’elle fait un tête à queue) et pouvoir conduire les voitures suivantes relance le challenge.

Mais n'oublions pas dans l’histoire un dernier mode de jeu appelé sobrement Destruction Derby et qui vous place dans une arène avec 19 autres véhicules dont un seul sortira vivant. La chose en question se passe dans The Bowl.

Another Car on the Bowl...

Alors que les moteurs ronronnent, il est temps de parler un peu plus du The Bowl du Destruction Derby de Pââriiiiiiiiss... The Bowl dans le monde vidéoludique mériterait des éloges. Ça tombe bien, j’ai envie de lui en faire un. Chanter les louanges de lieux qui n’existent pas est vraiment le luxe du gamer, et c’est en ceci qu’il se rapproche du rêveur ou du poète, alors pourquoi se priver ? The Bowl est un lieu de charpie ferraillée, de sauvagerie ludique à fond les turbines... Au fur et à mesure, j’ai fini par avoir des griefs contre lui. Je lui ai vu presque des défauts ou des choses que les créateurs du jeu auraient dû creuser et imaginer en extrapolant sur tout un tas de trucs et de fioritures qu’on aimerait retrouver dans nos jeux fétiches... Celles qui ne servent à rien mais qui permettent de faire de ces lieux qui n’existent pas des endroits presque réels avec ce qu'il faut d’âme pour qu’ils acquièrent un caractère unique, bien à eux. J’aurais aimé savoir combien de spectateurs il y a dans les gradins ? Comment s’appelle la montagne qui surplombe The Bowl ? Y a-t-il des commentateurs dans la tour des gradins ? Y a-t-il un resto ? Dans quel pays cela se situe ? Et surtout... Comment les voitures arrivent-elles là puisqu’il s’agit d’un endroit purement fermé, un Colisée ... grâce à des grues ? Ah, merci mon imagination de me répondre et de pallier à tout ça !

Ludiquement parlant, The Bowl est un exercice de style à lui tout seul. C’est de la sauvagerie tout d’abord, puis un long travail de patience si on arrive à bien se débrouiller... 99 points, voilà le quota indépassable de toute course de DD. Ce chiffre peut être atteint dans The Bowl si l’on a assez de style, de nerf, de doigté, bref de talent. C’est là que l’homo ludus y atteint un de ces genres d’accomplissements personnels qui émaillent fréquemment sa vie en essayant de relever le défi permanent de l’ordinateur... Bref, cette séance de torture automobile commence quand les 20 voitures disposées tout le long de la circonférence de ce circuit tout rond se lancent à tôle perdue les unes contre les autres... et là inutile de décrire la suite, le paysage se déchire et se fend littéralement de milliers de morceaux triangulaires colorés et le jeu subit là quelques ralentissements qu’on lui pardonnera aisément étant donné le véritable chaos graphique qui règne. Ce mode Destruction Derby vous propose de jouer un championnat uniquement composé d’une suite de The Bowl. Pour tout dire, c’est un peu usant et beaucoup auront du mal à trouver un réel intérêt à ce mode puisque faire un The Bowl à chaque fin de saison est déjà une gageure en soi...

Damned, un drapeau à damiers !

Destruction Derby est pour moi un grand jeu au charme difficilement définissable. On pourra lui reprocher bon nombre de choses et pour beaucoup il reste un soft mineur et médiocre. C’est vrai que les graphismes aux aspects parfois trop cubiques ou froids, à côté d’un rythme endiablé tendant vers l’arcade et d’une musique technoïde bizarre font un sacré cocktail, mais DD est l’un des meilleurs jeux défouloirs que je connaisse. Le plaisir qu’il procure ne réside pas dans la conduite qui offre des sensations tout compte fait assez éprouvées et classiques, mais plus dans le vertige et l’étourdissement qui s’abat çà et là au détour d’un virage ou à l’occasion d’une charge violente contre une autre voiture. Il ne s’agit pas d’un jeu où l’on se chronomètre, ni dans lequel on recherche la meilleure courbe possible afin de passer un virage, seule l’ivresse brute et sauvage compte, et c’est ça qui sauve Destruction Derby, cet instinct de destruction qui anime chaque gamer s’y frottant.

Absente, cette possibilité de carnage vidéoludique ne nous laisserait à jouer qu’un titre sans réel intérêt, qui n’aurait pas séduit un aussi grand nombre de joueurs. Car DD fut non seulement l’un des premiers jeux européens sur Playstation, mais aussi l’un des premiers à avoir atteint en quelques semaines le million d’exemplaires vendus. Il reste l’un des grands classiques de la PS1 et exerce sur moi une fascination qui tient de la notalgie mais se projette aussi dans l’avenir puisque avec ce genre de jeu, on est en droit d’attendre de futurs développements vidéoludiques où la possibilité d’engendrer un nombre incroyable de détails et d’effets réalistes renforcera le désir innocent d’assister à un festival d’anéantissement et de désintégration virtuelle.

À la place de simples rambardes de sécurité pixelisées il y aura par exemple des milliers de pneus usagés qui s’enflammeront avec les moteurs en sautant dans l’air comme des bulles de savon, et on aura affaire non pas à de simples pixels colorés pour figurer des morceaux de tôles mais bien à une infinités d’éléments véritables de voitures : des jantes, des pistons, des radiateurs, tous facilement reconnaissables lorsqu’ils s’écrasent sur le bitume ; on pourra voir des pilotes plus vrais que nature qui quittent la piste en sautant dans l’herbe avant l’explosion de leur engin, et retrouver ainsi l’esthétisme exquis des cascades de ciné et des accidents spectaculaires sans conséquences graves qu’on a adoré voir à la télévision étant jeune pendant les bêtisiers sportifs... Hé bien quoi ? On peut toujours rêver aux prochains jeux qui débarqueront un jour, non ? Ça aussi, ça fait partie du luxe du gamer... Le cinéphile, lui, ne peut rêver de manière aussi complète et globale aux futurs promesses du cinéma... L’arrivée de DD sur PS2 se rapproche d’ailleurs de plus en plus de cet rêve éveillé : Ã l'heure ou ces lignes sont écrites, Destruction Derby Arena est sorti et il possède, en plus de la présence du mode Online (et enfin d’un écran splitté pour le mode multi-joueurs), tous les perfectionnements graphiques qu’on était en droit d’attendre d’une console 128-bits.

Après le second opus, Destruction Derby 2 (dont une version optimisée pour Matrox Mystique était vendue en pack avec cette carte, de loin le plus beau DD qu'on ait vu), apparaît Destruction Derby Raw en 1996 qui intègre la possibilité aux véhicules de « décoller » littéralement du sol, Reflection aura sorti une manne d’épisodes sur différentes consoles tel le Destruction Derby Raw Platinum nouvelle mouture toujours sur PS1 ou Destruction Derby 64 sur Nintendo 64 (édité par Ubi Soft). N’oublions pas non plus la version Saturn, qui est cependant loin de valoir son homologue de chez Sony. La version de DD1 sur PC est aussi à mentionner puisque le jeu a subi à l’époque quelques améliorations, graphiques mais aussi au niveau du gameplay. La conduite s’avère beaucoup plus maniable et aisée que sur console. Les sons et la musique sont quant à eux très en deça de la moyenne sur PC. Enfin, il est à noter qu’un jeu éponyme a existé jadis. Destruction Derby est un jeu d'arcade conçu par Exidy, qui date de 1975 (à ne pas confondre avec Demolition Derby, de Bally Midway, sorti en 1984 et émulé par MAME)...

Je ne peux pas finir ce p’tit article sans délivrer, pour ceux qui les auraient loupés les cheat codes les plus fameux de Destruction Derby sur PS1. Au moment d’entrer votre nom, saisissez « ! DAMAGE ! » pour une voiture indestructible, « REFLECT ! » pour accéder au circuit caché du monastère, et « NPLAYERS » pour choisir le nombre de concurrents.

Gregoss
(11 décembre 2003)
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