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Super R.C. Pro-Am
Année : 1991
Système : Game Boy
Développeur : Rare
Éditeur : Nintendo
Genre : Jeu de Course

Nous sommes en 1991, soit trois années après le premier opus sur NES. Quelque temps auparavant, en 1989 pour être précis, Nintendo avait créé l'événement avec le lancement de sa fameuse Game Boy, une des consoles les plus vendues de l'histoire. Il était donc tout naturel pour Rare de choisir la portable en noir et blanc de Big N pour relancer la série R.C. Pro-AM avec un épisode intitulé Super R.C. Pro-AM. Cet épisode est une suite directe de la version NES et reprend beaucoup de points de l'opus sur console de salon, tout en proposant des améliorations fort bien venues. Alors bien sûr, les joueurs ayant déjà pratiqué le volet précédent sont en terrain connu : il s'agit toujours de participer à des courses de voitures radiocommandées, sur des circuits vus en 3D isométrique, tout en se servant d'armes diverses pour éliminer ses concurrents. La formule marchait bien sur console de salon, il n'y a pas de raison pour que cela n'en soit pas de même sur Game Boy...

R.C. Pro-AM revient sur la petite portable de Nintendo dans une version proche de l'originale mais loin d'être avare en nouveautés.

Cependant, ce second opus de la série R.C. Pro-AM avait un rôle tout particulier à jouer. En effet, Super R.C. Pro-AM fut développé dans l'esprit de promouvoir un nouvel accessoire pour la Game Boy : le Four Player Adapter. Cet objet, alors complètement nouveau, permet de brancher jusqu'à quatre machines pour jouer en multi-joueurs, tous ensemble. Certes, de nos jours, ce genre d'accessoires paraît banal, mais à cette période-là, c'était un vrai tour de force. Le Four Player Adapter de la Game Boy sort en 1991 en Europe, en même temps que le premier jeu de la machine qui l'utilisait, à savoir le fameux F1 Race (1991, Nintendo), grand classique de la ludothèque de la portable. Rare eut donc la lourde tâche de succéder à ce jeu de Formule 1 dans la liste des titres utilisant le Four Player Adapter, et Super R.C. Pro-AM fut donc le second jeu de la Game Boy jouable à quatre simultanément. N'ayant pas pu réunir les conditions pour l'essayer, je ne m'attarderai pas sur ce mode de jeu mais cette petite particularité fit du jeu de Rare l'un des jeux Game Boy les plus exposés du moment. Et vu le concept même du jeu, il était clair que R.C. Pro-AM allait réellement tirer profit du mode multi-joueurs que proposait cet accessoire. Quatre voitures, autant de joueurs, des armes un peu partout... Bref, tout ce qu'il fallait pour pimenter parfaitement les courses !

Grâce à ce petit câble, la Game Boy découvrit les joies du jeu à quatre en link ! Après les courses de Formule 1 du très bon F1 Race, les joueurs Game Boy pouvaient s'adonner aux joies des compétitions de petites voitures radiocommandées.

De l'importance du level design d'un jeu de course...

Super R.C. Pro-AM reprend dans les grandes lignes les bases de son illustre ancêtre, mais il se permet également de rajouter pas mal de petites choses. On l'a vu, la première de ces nouvelles possibilités, c'est le multi-joueurs. Un vrai plus, qui promet une durée de vie conséquente à la cartouche, si on a la chance d'avoir le Four Player Adapter, et également des potes prêts à s'user les rétines sur l'écran jaunâtre de leurs portables, pour des sessions jusqu'à quatre. Le deuxième ajout qui saute immédiatement aux yeux quand on se lance dans Super R.C. Pro-AM, c'est le progrès considérable effectué par l'équipe de Rare au niveau du design des circuits. Dans cet opus Game Boy, les circuits sont bien plus variés et bien plus diversifiés au niveau de leur tracé, mais ils sont également beaucoup plus jolis, bien mieux mis en valeur. Parmi les nouveautés qui ornent les circuits, on notera l'apparition de ponts et d'arches au-dessus de la route (même si ces derniers sont purement décoratifs, étant donné que le jeu se déroule toujours uniquement sur un seul plan, la troisième dimension, à savoir la hauteur, étant une fois encore mise à l'écart), des décors de bord de route plus variés, ainsi que des piles de pneus dans les tournants, comme pour les « vraies » voitures, celles qui ne fonctionnent pas grâce à des piles R6. Tous ces petits détails apportent beaucoup de vie au jeu, et du coup, on ressent moins l'impression angoissante de redondance qui prenait à la gorge le joueur dans l'épisode NES, ce sentiment de toujours rouler sur le même tracé, avec le même environnement. Super R.C. Pro-AM propose donc une vraie valeur ajoutée par rapport à son aîné au niveau des circuits, bien plus originaux et diversifiés.

Au niveau de l'habillage des circuits, Super R.C. Pro-AM est une vraie mine d'or, avec de nombreux éléments différents. Arches publicitaires à la gloire de Rare, drapeaux de tous les pays, rondins de bois, ponts au dessus de l'eau... Tout est bon pour dépayser le joueur et combattre le sentiment de monotonie que l'on ressentait quelque peu dans le premier épisode sur NES, épisode qui accumulait désespérément les circuits bordés uniquement d'une belle pelouse verte.

En plus de cette considération purement esthétique, les tracés sont également beaucoup plus intéressants que leurs prédécesseurs au niveau de la structure et des obstacles qui jalonnent la route. Il est déjà très intéressant de constater que des circuits proposant des rétrécissements de voie (idéal pour faire un joli bouchon qui ralentit bien toutes les voitures), ainsi que des passages avec deux routes différentes, ont fait leur apparition. Appréhender ces chicanes vous demandera beaucoup de concentration et de précision en termes de conduite. Passer une de ses portions sans toucher et perdre de temps est un challenge délicat mais de votre capacité à les appréhender dépend votre victoire. On note également l'apparition de nouveaux obstacles, comme des cônes de signalisation au milieu de la route (ces cônes étant forcément énormes par rapport à votre bolide, étant donné que vous pilotez, je vous le rappelle, des modèles réduits), ces derniers étant un vrai cauchemar vu que vous aurez tendance à rebondir dessus si vous ne parvenez pas à passer sans les heurter. Enfin, de grandes étendues de sable sont également au programme : bien plus difficiles à éviter que les flaques d'eau du premier R.C. Pro-AM, ces zones vous ralentiront considérablement si vous ne parvenez à les éviter. Tous ces ajouts rendent les courses encore plus passionnantes, les tracés étant encore plus vicieux et subtils que par le passé. Aucun doute à avoir là-dessus : c'est bien sur la conception des tracés de ce second volet de la série que les progrès par rapport au jeu originel sont les plus flagrants.

Déjà que sur les larges tracés du premier opus il était difficile de bien trajecter pour passer sans toucher, l'apparition de ces rétrécissements de la chaussée ne rend pas votre tâche plus facile. Concentration et talent seront les maîtres mots pour réussir à négocier toutes ces courbes et ces passages délicats sans rien toucher, virevoltant tel un artiste du volant en plastique.
À gauche, les étendues ensablées. À droite, les ignobles cônes de signalisation, décidément bien trop gros pour vos petits bolides. Ces cônes (que l'on devine) oranges sont un calvaire pour les pilotes tels que vous : une seule touchette et on bloque brutalement, perdant ainsi quelques mètres sur la voiture que l'on pourchassait.

Similitudes et différences.

En ce qui concerne le jeu en lui-même, Super R.C. Pro-AM ressemble comme deux gouttes d'eau à son grand frère. On retrouve donc dans cette version portable tout ce qui faisait la force du jeu de Rare, à commencer par son gameplay d'exception. Super R.C. Pro-AM jouit lui aussi de cette maniabilité si fine, qui fait la part belle aux glissades et aux dérapages. Du coup, après avoir joué à R.C. Pro-AM premier du nom, il suffit de quelques tournants sur cette mouture Game Boy pour retrouver ses marques. Les deux versions proposent cette jouabilité à deux boutons (un bouton sert à accélérer et l'autre à tirer), simple mais pas simpliste. De fait, on se remet très vite à déraper, à reprendre sa voiture avant qu'elle ne sorte de la trajectoire idéale, à chercher la courbe parfaite, tout en usant et abusant des armes, disséminés de ci de là sur les circuits. Du côté des options, il n'y a d'ailleurs aucun changement : on retrouve avec bonheur les bombes et les missiles, ainsi que la protection de carrosserie, tous ces éléments composant déjà l'arsenal du premier volet. Le joueur n'est donc pas désorienté : Rare a préféré capitaliser sur ce qui faisait la force du jeu NES, à savoir son gameplay fantastique, et se concentrer sur ce qui faisait défaut à l'époque.

Rare a réussi le tour de force de proposer la même jouabilité et les mêmes sensations que la version NES dans cette suite sur Game Boy. Le feeling exceptionnel du premier opus au creux de la main ! C'était loin d'être gagné, vues les capacités de la machine, mais Rare s'en sort avec brio.

On retrouve également dans Super R.C. Pro-AM le système d'upgrades basé sur les pièces détachées à glaner sur le circuit. Là encore, il faudra ramasser trois types de bonus pour améliorer son engin de course, afin de lui donner une meilleure accélération, une meilleure vitesse de pointe ou une meilleure tenue de route. Bien sûr, Rare propose à nouveau dans cette version le principe des lettres NINTENDO à récupérer, afin d'obtenir là aussi de nouveaux bolides. Dans Super R.C. Pro-AM, il y a trois types de voiture radio-commandée : la voiture initiale, la Speed Demon et enfin la Spiker (une sorte de véhicule au design improbable, avec des pics acérés fixés sur l'axe des roues....). Petite nouveauté anecdotique par rapport à R.C. Pro-AM : on ne recoit plus de coupes à la fin de chaque course. Dans Super R.C. Pro-AM, à la fin de chaque épreuve, un plan sur une vieille imprimante (avec le papier avec les trous sur les côtés, le petit détail vintage qui tue....) nous montre notre classement et notre score, ainsi que nos temps à chaque tour. Une nouveauté anodine mais qui permet de se lancer dans une sorte de Time Attack toujours motivant, surtout si on connaît d'autres pilotes jouant à cette version Game Boy.

Comme dans le premier jeu de la série, Super R.C. Pro-AM propose de jouer au jacky de la voiture radiocommandée et de glaner des pièces pour tuner son engin. Cependant, la meilleure solution pour avancer dans le jeu reste tout de même la solution des lettres à récupérer pour changer de véhicule. À vous les joies de frimer en jouant avec la Speed Demon (au centre) ou avec le pachydermique Spiker (à droite).
En fin de course, vous passerez voir votre imprimante à la pointe de la technologie (un modèle high tech, avec du papier ultra tendance) pour y consulter vos temps et votre score.

Même si le jeu possède de nombreux points communs avec son modèle, Super R.C. Pro-AM diffère sur un aspect très important : la structure. En effet, contrairement à R.C. Pro-AM qui boucle infiniment et pousse le joueur à la faute, sa suite sur Game Boy a une fin prédéfinie : lorsque l'on réussit à réunir toutes les lettres NINTENDO après avoir débloqué la Spiker, la fin du jeu s'enclenche. À part cela, le principe général du soft reste le même : Super R.C. Pro-AM reste un jeu à score, vous demandant d'enchaîner les courses et de faire gonfler votre capital points grâce à vos exploits sur la piste. Néanmoins, le fait de proposer une vraie fin au jeu a un double avantage. Premièrement, cette structure plus bornée permet d'éviter que le joueur termine sa partie sur un échec, chose toujours frustrante : en arrivant à la fin du jeu, le joueur a l'impression d'avoir accompli quelque chose, ce qui est plus gratifiant que l'enchaînement de circuits jusqu'à ce que mort s'en suive. Deuxièmement, cela donne aux développeurs un meilleur contrôle de la courbe de progression de la difficulté du jeu : cet opus Game Boy est bien mieux réglé que son grand frère sur la bonne vieille boite grise de Nintendo. On ne tombe jamais dans les réglages quelque peu ridicules du premier volet, avec ces niveaux bien trop durs et plus énervants qu'autre chose. Cependant, cela n'a pas empêché Rare de proposer à nouveau cette IA particulièrement irrita.... euh déroutante. Mais le problème de l'IA qui triche est ici bien moins visible, étant donné que le jeu n'arrive jamais dans les proportions démesurées de son aîné en termes de difficulté. En tout cas, l'idée d'apporter une fin à une partie de R.C. Pro-AM pour cet épisode Game Boy était particulièrement brillante, le joueur obtiné finissant désormais sa partie sur un succès très agréable, tout en ayant envie de recommencer pour le plaisir de rouler, de piloter, et de tenter de battre son high score.

Bravo, vous avez fini Super R.C. Pro-AM ! Vous êtes un champion, un vrai de vrai. Un de ceux qui n'ont pas peur de risquer leur vie au volant d'une voiture radiocommandée en plastique. Vous êtes un héros... Il ne vous reste plus qu'à traquer les High Scores dans la table prévue à cet effet.

Le même, ou presque, mais en mieux.

À la lecture de cette partie du dossier, vous vous dites probablement que la version Game Boy semble plus réussie que la version NES. Et vous avez bien raison : l'ajout du multi-joueurs, la grande réussite de la conception des tracés et le meilleur contrôle de la progression dans le jeu (que ce soit au niveau de la difficulté, le jeu étant bien moins dur que le premier épisode, qu'au niveau de la structure générale du soft) sont autant de points positifs qui font de ce Super R.C. Pro-AM une suite qui surclasse l'épisode initial. Cependant, s'il y a un domaine où cette suite fait un peu moins bien que son modèle, c'est au niveau de la réalisation technique. Certes, côté son, c'est très comparable : on retrouve les mêmes bruitages très quelconques et le minimalisme des musiques (une ou deux mélodies très courtes). Par contre, là où la NES proposait un jeu qui tournait parfaitement, la Game Boy nous offre un titre qui se comporte globalement bien mais qui a tendance à ramer de temps de temps, et donne lieu à des ralentissements assez conséquents, donnant l'impression que la portable est en train de déposer les armes, en agonisant, au creux de nos mains. Dans un jeu de course, c'est très pénalisant et cela a tendance à un peu atteindre la concentration du joueur : cela dit, c'est pas si fréquent que ça, mais c'est tout de même dommage. Il faut cependant reconnaître que les supports ne sont pas les mêmes, et que la NES en a plus sous le capot que la Game Boy. À part ça, Super R.C. Pro-AM s'en sort bien et offre un jeu plutôt joli, avec des sprites bien dessinés (et qui ne clignotent pas, détail important pour l'époque) et surtout plutôt rapide, les petites voitures roulant à toute vitesse sur le vieil écran à cristaux liquides.

Que l'on joue avec la Speed Demon ou avec la Spiker, le jeu va vite et l'impression de vitesse est bien rendue. Les courses n'en sont que plus frénétiques !

R.C. Pro-AM était déjà une réussite et s'était imposé comme un classique du jeu de course sur NES. Son petit frère, Super R.C. Pro-AM s'en tire aussi bien et se permet même de le surclasser sur pas mal de domaines, comme on a pu le voir. La formule initiale a été améliorée, tout en conservant les forces du premier opus, en particulier le gameplay typique de la série. Super R.C. Pro-AM connaîtra lui aussi un grand succès, devenant une des cartouches les plus vendues du moment. Rare ressortira d'ailleurs le jeu aux États-Unis à prix réduit en 1998 (soit 7 ans après la sortie du jeu ! La longévité de la première Game Boy m'étonnera toujours....) sous l'appellation Super R.C. Pro-AM Player's Choice – Million Sellers. Votre esprit vif et anglophone en aura conclu rapidement que le jeu avait dépassé le million de copies vendues dans sa première édition, pour atteindre la somme conséquente de 1,14 millions de jeux écoulés. Un score un peu en dessous du premier volet (qui avait atteint les 2,14 millions, je vous le rappelle) mais tout de même, le succès commercial est indéniable. Du coup, la licence ne pouvait en rester là et il ne faudra pas attendre longtemps pour voir apparaître le troisième épisode de la saga de Rare... Quoi qu'il en soit, Super R.C. Pro-AM est un grand classique de la Game Boy, son gameplay imparable en faisant l'un des jeux de courses les plus réussis de la portable de Nintendo. Un must, tout simplement.

La réédition de 1998 du hit de Rare sur Game Boy.

Pour info, sachez que Super R.C. Pro-AM avait été testé par Crevette (Cyril Drevet) dans le magazine Player One numéro 15, daté de décembre 1991, et avait obtenu la note de 89 % : « Super R.C. Pro-AM bénéficie de la même qualité de finition que F1 Race (hormis quelques petits ralentissements étranges dans les derniers levels). C'est du tout bon, les graphismes sont agréables et fort réalistes, puisque l'on a vraiment l'impression de commander une voiture radio-commandée. Le plaisir de jeu est là, le défi aussi, et on peut y jouer à quatre... Que demande le peuple ! »

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